Censure

La gestion efficace des ordures dans la capitale Conakry : un challenge pour nos autorités (Par Mamadou Safayiou Diallo)

L’objectif de ce travail n’est pas ressasser les nombreux échecs du gouvernorat de la ville de Conakry dans sa lutte contre ce phénomène à travers ces multiples tentatives d’assainissement de la ville de Conakry, mais d’éclairer la lanterne de l’opinion publique et les décideurs politiques sur les véritables enjeux des réformes à entreprendre dans ce secteur.

D’entrée de jeu, il convient de souligner que la gestion des déchets et ordures, est l’un des postes le plus coûteux dans les budgets des autorités communales dont la raison d’être d’ailleurs, est de veiller au bien-être de la ville et de ses habitants.

En Guinée, le service ayant la lourde tâche d’assurer une gestion sans reproches des ordures dans la capitale Conakry, souffre d’un certain nombre de difficultés dont entre autres : le manque de financement de ces activités, la faible participation des populations à la salubrité (dû parfois à un manque de sensibilisation sur les conséquences de l’insalubrité sur le plan sanitaire) et l’absence de politiques publiques ou d’une stratégie nationale axée sur la gestion des ordures ne serait-ce qu’en milieu urbain.

C’est pourquoi, bon nombre des guinéens estiment que la gestion des ordures dans la ville de Conakry est aujourd’hui catastrophique. Les sources des ordures et déchets que nous rencontrons en longueur de journée dans les rues de notre capitale proviennent essentiellement des ménages, des lieux publics (marches, hôpitaux, écoles, …), des démolitions/constructions des bâtiments et d’opportunité des industries…

Cette analyse succincte, ne touchera malheureusement le traitement des ordures (recyclage, le compostage et l’incinération) pour ne pas abuser du temps du lecteur. De même, le mode de transport des ordures sera touché brièvement dans les solutions proposées.

Par ailleurs, aucune étude n’est parvenue (à notre connaissance) à évaluer le volume des ordures et déchets produits dans la capitale Conakry. En notre qualité de chercheur, nous pensons que la résolution d’une telle problématique devrait passer par l’implication des universitaires, via des grands travaux d’enquêtes d’opinion qui, à notre sens permettront ainsi de quantifier ce phénomène et par extension le résoudre une fois pour toute.

Malgré que notre communauté académique renferme de nos jours d’excellents cadres pétris de talents, bon nombre d’entre eux, n’osent pas proférer des critiques à l’encontre des autorités publiques par crainte de perte d’emploi et/ ou des représailles. La dernière fois, un grand universitaire de ce pays nous a intimé de faire attention à nos critiques objectives (ceci, fait suite à nos observations sur la décision du gouverneur de la BCRG d’introduire dans un futur très proche, un billet de GNF 2 000 dans la circulation fiduciaire) dont le but est de hisser notre pays au rendez-vous du développement durable. Une telle situation nous pousse à nous interroger sur la liberté d’expression des universitaires guinéens surtout ceux de la fonction publique.

En refermant cette parenthèse sur l’implication des universitaires à travers une/des réflexion (s) profonde (s) sur la problématique de gestion des ordures à Conakry, nous affirmons sans risque de nous tromper qu’il est très difficile de dire aujourd’hui avec certitude combien d’ordures sont produites par an/mois/jour par les différentes sources susmentionnées dans la ville Conakry. Nonobstant les autorités publiques estiment qu’en moyenne 2 000 tonnes de déchets seraient produites chaque jour dans la ville de Conakry. Ce qui est énorme à notre sens.

Nous ne saurons terminer cette toute petite analyse, sans pour autant proposer quelques pistes de solution comme tout citoyen guinéen soucieux du devenir de notre pays. Pour notre part, nous pensons que les autorités administratives doivent :

  1. i) sensibiliser davantage les populations sur les enjeux de l’insalubrité : cette situation explique en grande partie la faible participation des populations à la salubrité du fait d’un incivisme (sur le plan écologique) qui ne dit pas son nom. Bon nombre des ménages guinéens passent tout leur temps à jeter les ordures dans les caniveaux, les routes et même sous les ponts au vu et su de tout le monde. Pour accroître le niveau du civisme des guinéens sur ce phénomène, les campagnes de sensibilisation, les formations des citoyens sur la gestion des ordures, ainsi que les spots publicitaires allant dans ce sens doivent être multipliés.
  2. ii) revoir la fréquence de collecte : le choix d’une période de collecte est primordial pour la réussite de cette activité. Toutefois, nous pensons que cette opération doit se tenir quotidiennement car, le volume de déchets pourrait augmenter d’un mois à l’autre. De plus, cette opération peut se dérouler pendant la nuit plus précisément de 23 h à 5 h du matin car, elle empêche le déroulement normal des activités quotidiennes entre 8h et 12h et multiplient les embouteillages.

iii) définir des points de collecte : cette situation passera par l’identification d’endroits qui seront considérés comme étant les dépotoirs d’ordures pour les populations. Toutefois, il convient de souligner que le choix de ces endroits doit obéir impérativement aux normes environnementaux. Les autorités publiques doivent ainsi installer des poubelles publiques aux coins des rues des endroits ciblés (accessibles aux collectionneurs d’ordures) pour la circonstance, dans lesquels les ménages y seront conviés à mettre leurs ordures.

  1. iv) réfléchir sur la possibilité de mettre en place un système de collecte par bloc: nombreux sont les pays du monde qui utilisent de nos jours cette approche malgré qu’elle demande beaucoup de moyens financiers et une organisation infaillible. Elle consiste en la circulation des camions de transport d’ordures selon un itinéraire bien défini et connu des populations. Une fois que ces camions de collecte de déchets arrivent au lieu indiqué, des signaux d’alertes sont émis à l’endroit des populations. En entendant ces signaux, les ménages sortent avec leurs ordures déjà préparées, pour les mettre à disposition des collecteurs. Contrairement au système précédent, ce dernier n’admet pas de poubelles publiques le long des routes.
  2. v) penser à la privatisation de ce secteur : la gestion des ordures en République de Guinée exige d’énormes défis à relever par nos autorités publiques. En plus des moyens financiers, elle implique aussi des moyens techniques à mettre en œuvre mais aussi et surtout des politiques cohérentes et d’un management très efficace. Etant donné notre connaissance d’efficacité et de perspicacité des autorités publiques notamment sur les points mentionnés, nous pensons à notre fort intérieur que ce secteur mérite d’être privatisé. Une telle situation relance le débat sur la sous-traitance via des appels d’offres dans le respect du cadre légal et réglementaire des passations des marchés publics pour la sélection des entreprises soumissionnaires.
  3. vi) fiscaliser le secteur : dans la plupart des pays du monde, l’enlèvement des ordures est soumis à un régime fiscal progressif en fonction de la production desdites ordures. Cette mesure devrait permettre aux municipalités de lever les ressources utiles à la salubrité de leurs communes mais aussi et surtout de financer les campagnes de sensibilisation, des formations et des spots publicitaires…
Mamadou Safayiou Diallo

En somme, la gestion des ordures et déchets en République de Guinée doit être assurer par l’effort conjoint des de l’Etat via ses collectivités locales décentralisés et déconcentrés, les ménages et les entreprises productrices ainsi que celle impliquées dans la collecte, le transport et traitement des ordures. Pour y parvenir un cadre réglementaire, interactif, incitatif et pour résumer le tout performant (somme d’efficacité et d’efficience) doit être mis en place en vue d’une synergie d’action dans ce secteur laissé à lui-même. Pourtant, à observer ce secteur, on se rend bien compte qu’il pourrait être utilisé comme l’une des alternatives au chômage des jeunes (instruits et non instruits). Il serait donc d’une grave erreur que de sous-estimer son potentiel et de laisser ce secteur pour compte…

 

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