Censure

Profanation de l’image de Sékou Touré au pont du 8 Novembre / Une complication historique et une entorse culturelle

Les portraits réalisés par la structure Guinée Challenge, dans le cadre du festival « Lassiri Graffiti », sur le pont du 8 Novembre,  viennent d’être barbouillées à la peinture rouge, et précisément à l’emplacement de l’image de l’ancien président, Ahmed Sékou Touré.

Qu’est-t-il arrivé à l’effigie du premier président guinéen, en cet endroit ? Apparemment, la question restera sans doute posée ! Vu que personne ne peut témoigner de ce qui est arrivé à cette œuvre d’art placée à l’entrée principale du centre-ville de Conakry.

D’un point de vue culturel, c’est en effet  déplorable, quand on sait que lorsqu’on a rencontré, il y a quelques semaines, l’auteur de cette effigie, M’Baye Aïssatou Fall alias « Lefa » nous a expliqué que : « Notre objectif, c’est quoi ? Comme l’ont fait les Sénégalais, c’est d’embellir la ville de Conakry. Et de faire passer des messages à travers les images, mais des images qui appartiennent à nous, Africains, à nous les Guinéens. Pour cette première édition, nous sommes partis sur le panafricanisme ».

Tout en ajoutant que : « Moi, je suis un artiste, mon projet n’a rien de politique ».

Sur place, ce qui semble être l’objet de cette action que d’aucuns qualifient de « profanation », un chiffon imbibé de peinture rouge y  est toujours présent.

Décrié depuis le début…

D’un autre côté, une douloureuse histoire politique persiste et signe, surtout quand on considère la dernière conférence  de l’Association des victimes du camp Boiro (AVCB), le mercredi 26 décembre. Ces derniers se sont indignés de la présence de l’image de  l’ancien président guinéen, parmi d’autres panafricanistes, et exigé le retrait de cette effigie dans un court délai.

Lors de cette conférence, le  député uninominal de Dinguiraye, l’Honorable Fodé Maréga, fils de l’une des victimes de l’ancien régime, estime que « ce pont est non seulement le symbole des martyrs de la première république, mais il a aussi été théâtre de tueries de dizaines de jeunes Guinéens venus manifester pacifiquement en 2006. L’Etat s’était alors engagé à y apposer une stèle, en mémoire à tous ces martyrs, nombreux en Guinée. Ce pont ne saurait être souillé par l’effigie de celui qui a ordonné les exécutions de toutes sortes, durant les 26 ans de règne de la première république ».

Plus loin, Dr Fodé Maréga a invité les autorités guinéennes à prendre leurs responsabilités vis-à-vis de l’histoire du pays et a demandé que la mémoire de ces victimes soit protégée : « Il est donc inadmissible qu’une autorité guinéenne, quelle qu’en soit, dotée d’un minimum de sens de la responsabilité vis-à-vis de l’histoire de ce pays, puisse prendre la décision d’autoriser un tel acte ignoble. Au nom de la mémoire de milliers de Guinéens exécutés sauvagement sous la première république, nous exigeons que ce symbole soit protégé par l’Etat ».

L’auteur de cette action doit avoir ses raisons. En attendant de l’identifier, chacun tire ses propres conclusions de cette histoire.

Abdou Lory Sylla pour Guinee7.com

 

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