Censure

Le bloc-notes de Zacharie : Judas et Cloporte

Jean Marie Doré et Ousmane Gaoual Diallo

Grand ouf de soulagement que la constitution, enfin, du bureau de notre assemblée nationale. En effet, il s’est agi d’une tâche qui avait suscité autant de bruits que d’interrogations. On retiendra, au-delà des prises de bec à l’hémicycle, des règlements de comptes fort sadiques où d’Honorables députés ont dû remettre aux valises le discours de l’honneur pour baigner dans le registre du déshonneur. Deux d’entre eux ont interpellé ma plume.

Ousmane Gaoual d’abord, député de la plus forte formation politique de l’opposition guinéenne, il assume fièrement d’avoir traité l’autre de « Judas de la politique guinéenne ». Au premier abord, l’expression vous laisse esquisser un certain sourire. Mais à s’y intéresser de plus près, l’on se rend compte de la portée de l’allusion sur la personne d’un député.

Vous le savez, Judas Iscariote est ce disciple du Christ qui a conduit celui-ci à la croix pour trente pièces d’argent. A travers cette image Gaoual fait de Jean-Marie Doré un député sans aucun sens moral. Il le présente comme un politicien à la convoitise exacerbée, un député qui retourne de veste à la moindre occasion, un cupide qui croit que tout est à revendre. L’autre aspect de l’allusion se rapporte au fait que Judas finit pendu ! Gaoual préfigure-t-il déjà la fin ignominieuse de Monsieur Doré ? Qui du  peuple ou des politiques devra en pâtir pour cela ? Nous le saurons par les instants à venir.

Ensuite vient la réplique naturelle d’un Jean-Marie Doré connu de la presse guinéenne. Lui fait appel à un vocabulaire emprunté aux sciences animales, et un seul mot suffit à tout dire : un cloporte. Il s’agit au départ d’un crustacé, insecte de l’ordre des isopodes. Le terme s’est transporté aux usages quotidiens pour désigner – termes très voisins –, soit un concierge, pour leur loquacité naturelle, soit un portier, pour ce qu’ils ne servent qu’à ouvrir et à fermer des portes.

Du concierge, on aurait bonnement passé outre, mais du portier, il est à se demander pour qui l’Honorable Gaoual ouvre-t-il et ferme-t-il des portes. Autrement dit, de qui sert-il les desseins ? Ne serait-il donc qu’un chargé de sales missions ? Il en ressortirait que Monsieur Doré essaie, en répondant à Gaoual, de faire d’une pierre deux coups : il cherche à indexer le commanditaire de Gaoual, celui de qui il est, et le concierge, et le portier !

Une question à la fin, reste-t-il à nos honorables une seule once d’honneur après ce spectacle digne d’un battle à l’américaine ? Il est certes permis aux députés d’être poignants entre eux, mais le cadre qui le leur permet devrait rester l’hémicycle !

zachariemills@gmail.com

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