Censure

Le FMI revoit les prévisions de croissance de la Guinée à 5,2%: ‘‘dopage de chiffres’’, estime Nasser Keïta, économiste

Le FMI après sa dernière revue du programme guinéen a revu les prévisions de croissance du pays à 5,2% au lieu de 3,8%. Si cette annonce réjouit le gouvernement guinéen elle laisse sceptique certains économistes comme M. Nassirou Narena Keïta alias Nasser, économiste chevronné, directeur général du Laboratoire de Recherche en Economie et Conseils.

A propos de l’annonce faite par le FMI, il se dit ‘‘encore d’accord avec Joseph Eugène Stigliz (prix Nobel en Économie, 2001) qui dit que dans les pays en développement, les prix ne dépendent pas nécessairement de la politique monétaire. Ces pays subissent une inflation relativement plus élevée, due à la poussée des prix du pétrole et des denrées alimentaires qui absorbent la partie importante du budget des ménages. En conséquence, l’utilisation des instruments de politique monétaire n’aurait que peu d’impact sur les prix, et la crédibilité d’une Banque centrale qui s’engagerait dans un régime de ciblage d’inflation comme l’indique implicitement les recommandations du FMI au cours de son dernier passage sera mise à l’épreuve’’.

Il ajoute que ‘‘si vous avez une économie mirobolante, il est superflu, absurde, qu’on vous mette la poudre aux yeux en disant que votre croissance va atteindre les 5,2%. Au lieu de toujours procéder à ce dopage de chiffres, il est plus essentiel pour vous de vous prendre en charge au plan scientifique et spécifier correctement vos modèles qui seraient plus cohérents avec les caractéristiques de vos économies et l’ambition affichée de vos dirigeants pour réduire la pauvreté relative car, pour l’économiste, c’est la pauvreté relative qui doit être prise en compte plus que la pauvreté absolue’’.

Sa solution ? ‘‘Avec les deux moteurs de la croissance: la productivité et le taux d’emplois, c’est le taux d’emplois qui réduit la pauvreté relative avec bien sûr une bonne politique fiscale capable d’harmoniser correctement les systèmes de prélèvements fiscaux aux profits des pauvres’’.

Du coup, il rappelle de manière générale que ‘‘les autorités monétaires de vos pays devraient se concentrer sur des choses plus essentielles en matière de politique monétaire que de se focaliser aux mouvements des prix sans même avoir un seul jour eu la curiosité d’annoncer le taux actuel de chômage. Ça aussi c’est dommage et stupide, dans vos pays tout le monde peut annoncer les objectifs de politiques de vos gouvernements, chacun de son côté annonce le chiffre qui lui vient en tête sans même se référer aux autorités chargées de l’élaboration de la politique économique, c’est aussi cela que les économistes scientifiques appellent l’incohérence temporelle, qui décrédibilise vos gouvernements, qui peut aussi impacter négativement vos anticipations inflationnistes, c’est vraiment dommage et stupide encore une fois’’.

Pour tout dire, ‘‘dans un bateau, si vous avez plusieurs gouvernails, plusieurs capitaines, je me demande comment vous allez bouger’’, se désole l’économiste sur sa page Facebook.

Ibrahima S. Traoré pour guinee7.com

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