Nous avons rencontré à Conakry ce jeudi 3 avril Kemo Keita alias Papi Flex, le contorsionniste qui a récolté le prix Guinness World Records en Italie en battant tous les records. Ce professionnel du cirque est entré dans trois boîtes en 26,4 secondes, battant ainsi l’ancien record qui était de 30 secondes. Un véritable exploit qui restera longtemps gravé dans l’histoire de ce sport.
Au cours de cette rencontre, il nous a révélé les secrets de sa réussite, ses aspirations, mais aussi sa déception.
Guinee7.com : Parlez-nous de la prestation qui vous a valu cette reconnaissance au Guiness World Records.
Papi Flex : J’étais aux États-Unis quand j’ai été contacté. C’était de savoir si je pouvais faire ce record, cela après avoir visité mon profil et vu ce que je pouvais faire et les prix que j’ai gagnés. Ils m’ont demandé si c’était possible de faire ce record en 30 secondes. Il y a eu plein de propositions, mais on est tombé d’accord sur les boîtes. Il était question de passer dans trois boxes en moins de 30 secondes, qui était l’ancien record. Moi, j’ai terminé en 26,4 secondes.
Est-ce que pour vous c’était un rêve de récolter ce prix ?
C’était un grand rêve, comme pour tout artiste ou tout sportif, que votre nom soit dans l’histoire du Guinness World Records. C’était l’un de mes plus grands rêves quand je vivais déjà en Guinée. Et si je vois aujourd’hui ce rêve se réaliser, je suis super content d’avoir atteint ce niveau.
Quel sentiment vous animait au moment de recevoir cette distinction ?
Je me suis juste rappelé tout le temps que j’ai fait en Afrique et le rêve que je faisais en pensant que tout est possible. Aujourd’hui, me voir sur une scène mondiale qui est mondialement connue et gagner un prix dont d’autres artistes avant moi ont rêvé. Et puis faire partie aussi des premiers artistes de Guinée à gagner, parce que dans ma mémoire il n’y a pas un autre artiste guinéen, sauf le sportif Iya que je connais. Donc, je suis très très content de représenter la Guinée. De toute façon, c’est mon pays, je n’ai pas le choix. J’aime, j’aime mon pays, j’aime la Guinée.
Derrière cette joie et cet amour que vous ressentez pour le pays, vous sentez-vous reconnu ?
Pour la reconnaissance, ce n’est malheureusement pas notre État. Avant ça, j’avais gagné d’autres prix, bien que celui-ci soit le plus grand. Mais je n’ai pas encore reçu de message d’un responsable ou du ministère de la Culture. Mais ils aiment quand même partager. Je mets une photo, ils prennent directement, ils partagent. Au moins, le respect voudrait qu’ils me contactent et me disent : « Nous allons partager tes photos, tes vidéos. » Quand j’ai partagé ma première photo, j’avais pensé peut-être qu’ils ne savent pas que j’étais en Guinée, et du coup j’ai partagé la 2ᵉ pour leur dire que je suis en Guinée et que je reste entièrement disponible pour les médias, l’interview et même pour les autorités en place. Mais ils n’ont eu aucune réaction et quand j’ai partagé la vidéo aussi, ils ont pris la vidéo pour la mettre et puis me féliciter. Pour moi, le respect était de m’informer avant et me féliciter. Même un petit message, ça sera super cool pour moi. Mais ils n’ont pas ça. Mais peut-être qu’ils vont se rattraper. C’est mon pays de toute façon. Sinon, je suis résident en Belgique et je fais ma vie là-bas.
Est-ce que cette non-reconnaissance vous pousse à vous pencher vers la Belgique ou vous restez ferme à représenter la Guinée ?
J’ai déjà représenté la Guinée dans plusieurs pays différents. Par exemple, j’avais joué en Angleterre, ils avaient tous partagé à l’époque que je suis belge. Je les avais contactés pour leur dire que je suis résident permanent en Belgique, mais que je n’aimerais pas d’abord qu’on me mette le nom de la Belgique, même si je me sens à moitié belge parce que j’ai un enfant qui est belge avec une Belge. C’est dommage quand même de le dire, parce que c’est mon métier et ça passe très très vite. Tu vois, le sport et l’art passent en général très très vite, là ça passe très vite. Donc pourquoi pas, s’ils [les autorités guinéennes] ne reconnaissent pas prochainement que je travaille pour la Belgique. Parce que là-bas, c’est plus facile de t’aider. Je ne veux pas beaucoup rentrer dans ça. Peut-être que les autorités vont se rattraper en voyant cette interview.
C’est quoi les perspectives de Kemo après ce prix ?
J’ai plusieurs projets en place après ici. Je travaille souvent pour des émissions télévisées. Je remplace souvent aussi des acteurs en Belgique, en Angleterre et aux États-Unis. Je dois aussi travailler avec le Cirque du Soleil, c’est le plus grand cirque du monde. Et après, je dois aussi travailler pour Virgin Voyage. C’est le bateau de croisière aux États-Unis qui appartient à l’un des milliardaires britanniques. J’ai déjà travaillé six mois là-bas et je dois retourner aussi en septembre. Je rêve de construire une école en Guinée et de créer ma compagnie de cirque en Belgique. Je suis déjà sur le projet avec une jeune femme belge qui est danseuse. Je dois venir en Guinée avec elle. J’aime mon pays.
Interview réalisée par Abdoul Lory Sylla pour guinee7.com