Censure

CNT. Quand l’omnipotent dit non, tout le monde rentre chez soi

Il fallait être journaliste, membre d’une association de presse ou simplement un spécialiste en illusion institutionnelle pour assister à l’une des plus grosses déconvenues de cette saison des pluies : l’atelier fantôme du CNT à Coyah.

Jeudi dernier, sous l’impulsion du président de la commission Communication et Information du Conseil National de la Transition (CNT), une noble mission était annoncée : relire, en toute sérénité et à l’abri de l’inconfort des inondations de Conakry, la proposition de loi portant organisation, composition et fonctionnement de la future “Commission de Régulation de la Communication et de l’Audiovisuel”. Une sorte de HAC 2.0, censée réguler les médias et, accessoirement, les réveils du président du CNT.

Trois jours. Dans un hôtel. À Coyah. Tout était prévu, sauf… le feu vert final. Car malgré la présence des participants (vices présidents du CNT, honorables conseillers, membres d’associations de presse, journalistes), les travaux ne commençaient pas. Un long silence s’installait dans la salle dotée de bouteilles d’eau minérale, de blocs-notes et de stylos à encre fraîche.

Pourquoi ce retard ? Selon des indiscrétions, il fallait convaincre le Très-Haut président du CNT, Sa Transitionnelle Majesté Dansa Ier, de valider l’atelier. Problème : il semble qu’il était informé. Mais pas convaincu. Et apparemment, ce n’est pas parce qu’un président est au courant qu’il est d’accord. Logique de la transition ou du moins, du CNT.

Résultat ? Alors que l’atelier allait enfin démarrer, surprise royale : un vice-président du CNT, en mode messager céleste, balance la bombe : “C’est annulé’’. Il aurait reçu un appel de là-haut. Rideau.

Pas de débat. Pas de relecture. Pas même une minute de simulation démocratique. Juste des participants groggy, venus de Conakry, qui ont abandonné familles, bureaux, bravé les embouteillages pour une non-activité de qualité supérieure. La salle était prête, le programme ficelé, mais la démocratie participative venait d’être dissoute… par un coup de fil.

Petite touche inattendue : aucun remboursement n’est prévu. Les participants sont invités à rentrer chez eux avec leurs baluchons préparés pour trois jours et leur… frustration ! Avec pour seul lot de consolation, un repas déjà payé. ‘‘Il faut au moins profiter de ça’’, lâche un confrère, regard perdu dans le jardin de l’hôtel.

Conclusion ? Au CNT, on ne plaisante pas avec la chaîne de commandement. Ou plutôt, si. On en fait un sketch grandeur nature. Une HAC à réécrire ? Peut-être. Mais à ce rythme, c’est surtout le scénario de l’organe de transition qu’il faudra revoir. En trois jours. A la Maison blanche de Soumbouya. Mais cette fois, avec l’accord du patron.

Ibrahima S. Traoré pour guinee7.com