Bernard Goumou voulait montrer sa détermination. Sur sa page Facebook, l’ancien Premier ministre a posté fièrement : ‘‘Même les routes les plus difficiles ne peuvent freiner une mission de paix et de l’unité du pays… Voter OUI, c’est voter pour que plus jamais aucune localité ne soit oubliée.’’ Mais à l’appui de ces paroles solennelles, il a eu la mauvaise idée de publier des images de son cortège coincé dans la boue rouge. Résultat : au lieu de convaincre, il a offert aux internautes un festival de sarcasmes.
La scène est trop belle pour ne pas faire… rire jaune ! Quatre ans de Transition, et voilà que l’un de ses ex-premiers ministres illustre lui-même l’échec le plus visible du régime : l’absence de routes praticables. Le message de mobilisation s’est transformé en caricature instantanée : ce n’est pas seulement le 4×4 de Goumou qui est embourbé, mais tout un pays enlisé dans des promesses non tenues.
Ceux qui ont bonne mémoire rappellent que Bernard Goumou avait annoncé à Dubaï une levée de 7 milliards de dollars pour relancer l’économie. Un an et demi plus tard, pas de milliards à l’horizon, mais des flaques d’eau à perte de vue. Les routes, elles, envasent, cassent.
Le contraste est cruel. Car pendant sa Primature, Goumou répétait : ‘‘Les défis infrastructurels de notre Gouvernement sont d’accroître le stock d’infrastructures tout en le maintenant en bon état pour renforcer les bases matérielles du développement du pays et accélérer sa croissance économique.’’ À voir son convoi s’embourber, on comprend que les discours ont mieux circulé que les bulldozers.
La route en question mène à Zogota, lieu marqué par une bavure policière sous Alpha Condé, instrumentalisée depuis par des politiques. Les mauvaises langues disent que Goumou aurait pu éviter cette épopée boueuse -en construisant pendant qu’il était aux affaires, cette route-, mais que s’il devait absolument se rendre quelque part, c’était bien là. Au moins, pour une fois, sa démarche aurait eu un parfum de solidarité. Mais fallait-il pour autant l’immortaliser en direct sur Facebook, au risque de se transformer en contenu viral ?
Pour tout dire, la communication de Bernard Goumou, en voulant tourner la boue en preuve d’abnégation, n’aura fait qu’enfoncer un clou supplémentaire dans le cercueil de la crédibilité. Le OUI qu’il défend se perd dans les flaques, et ses slogans de paix et d’unité pataugent dans la gadoue. En politique, mieux vaut éviter d’illustrer son discours avec ses propres échecs. La boue, elle, ne fait pas de cadeau : elle engloutit à la fois les pneus et les belles paroles.
Ibrahima S. Traoré pour guinee7.com