Censure

Kaporo-Rails : De la réparation promise à la désillusion prolongée

Wankifong (Coyah), samedi 14 septembre 2024.
Ce jour-là, sous un soleil éclatant, un vent d’espoir soufflait sur les visages marqués par l’injustice. L’État guinéen, après des années de silence, procédait à la remise officielle de titres fonciers et plans parcellaires aux victimes des déguerpissements de Kaporo-Rails, Kipé 2 et Dimesse. Un moment historique et profondément émouvant, marquant enfin une reconnaissance de leurs droits spoliés.

Après 27 ans d’attente pour certains, six ans pour d’autres, c’était la fin d’un calvaire. La douleur semblait trouver un apaisement. Les familles dispersées, les larmes versées, les humiliations subies… Tout cela devait enfin trouver réparation.

Mais à peine un an après cette cérémonie, la désillusion a remplacé l’espoir.

Le site de 258 hectares promis reste à l’abandon. Les travaux d’aménagement sont au point mort. Les appels du ministère de l’Urbanisme et de l’Habitat, autrefois fréquents, se sont soudainement tus, évoquant de vagues « travaux techniques sur le terrain ». Depuis, plus rien. Le silence des autorités est assourdissant.

Les victimes vivent une nouvelle forme d’injustice, celle de l’attente interminable, de la promesse non tenue. Elles se sentent oubliées, trahies, abandonnées.

Pour ces familles, les souvenirs des casses restent vifs. Des maisons détruites, des vies brisées, des familles éclatées. Beaucoup ont tout perdu. Certains ont perdu la vie sans jamais avoir vu l’ombre d’une indemnisation. D’autres vieillissent, fatigués par l’attente et le mépris.

Indemniser ces victimes, c’est plus qu’un acte administratif. C’est un devoir moral. C’est rendre justice. C’est reconnaître les erreurs du passé et œuvrer pour qu’elles ne se répètent plus.

Aujourd’hui, il est encore temps de réparer. De rattraper le retard. D’honorer la parole donnée. D’accélérer les procédures, d’aménager le site, de permettre enfin aux victimes de reconstruire leur vie, leur dignité, leur avenir.

« Si la justice est la boussole », comme le proclament les autorités, alors il est temps d’agir. Car la justice ne se limite pas aux discours : elle se mesure à l’action, à la réparation, à la considération des plus vulnérables.

Les victimes de Kaporo-Rails n’ont pas besoin de pitié. Elles réclament justice, action et respect des engagements pris. La République doit tenir sa promesse. Car chaque jour qui passe sans réponse est une injustice qui se prolonge.

Par Ibrahima Sory Diallo