Censure

Grève dans l’éducation : Balamou accuse le ministre Cedy de déconnexion et met en garde contre une radicalisation

Alors que la grève dans le secteur de l’éducation continue de paralyser de nombreux établissements, le syndicaliste Pépé Michel Balamou a livré un long commentaire dans lequel il critique vivement la posture du ministère de l’Enseignement Pré-universitaire et de l’Alphabétisation (MEPU-A). Selon lui, les autorités auraient « compromis le rapprochement des positions » en adoptant une communication qui « s’inscrit dans le déni de la réalité ».

Un communiqué ministériel jugé irresponsable

Dès l’entame de son intervention, Pépé Michel Balamou déplore la récente prise de parole du département de l’Éducation : « le communiqué du ministère de l’Enseignement Pré-universitaire et de l’Alphabétisation s’inscrit dans le déni de la réalité. Et cela est de nature à compromettre le rapprochement des positions pour définitivement résoudre la crise. »

Pour lui, le contraste est clair avec la position gouvernementale : « vous avez vu le communiqué du Gouvernement qui appelle au calme. Il est plus responsable que celui du MEPU-A qui stigmatise les élèves sur fond de stéréotypes. »

Jean-Paul Cedy accusé d’être « déconnecté »

Le syndicaliste charge ensuite directement le ministre Jean-Paul Cedy, qu’il accuse de manquer d’informations fiables et de minimiser l’ampleur de la crise : « le ministre Jean-Paul Cedy est en train de négliger une crise scolaire qui affecte dangereusement son département. Il me fait pitié pour la raison bien simple qu’il n’a pas la bonne information et il est déconnecté des réalités du terrain. »

Selon lui, les responsables déconcentrés du ministère cachent la vérité : « tous ceux qui l’entourent et les responsables des structures déconcentrées ne lui disent pas la vérité. Chacun sauvegarde son poste et défend ses propres intérêts. Le seul regard extérieur objectif qui pourrait l’aider à comprendre la profondeur de cette crise, c’est la presse. »

Il affirme d’ailleurs que le ministre se base sur « des faux rapports » et nie l’évidence : « tout le monde sait que les cours sont totalement paralysés à l’intérieur et dans les communes de Ratoma, Matoto et Matam depuis une semaine. »

Des écoles paralysées et un climat explosif

Pépé Michel Balamou dénonce une situation de blocage total dans de nombreux établissements publiques : « les chefs d’établissement ont pris le malin plaisir de garder les élèves en classe jusqu’à midi, en l’absence des professeurs. Ils ferment les portails pour éviter que les élèves sortent. »

Il pointe également une grève « perlée » menée par certains enseignants :
« Certains enseignants font une grève perlée c’est-à-dire rotative. Ils vont aujourd’hui, demain, ils s’absentent et parfois, ils font de la simple figuration en classe parce que démotivés. C’est aussi la dimension psychologique de la grève. »

Selon lui, le retour des élèves ce lundi n’a rien résolu : « ce lundi, les élèves sont revenus à l’école et ils ont retrouvé le même scénario : pas de professeurs. Raison pour laquelle ils ont pris la rue et attaqué les écoles privées pour interpeller le Gouvernement sur leur sort, surtout les candidats aux différents examens nationaux. »

Un audio controversé au cœur des tensions

Balamou affirme que le ton s’est durci à cause d’un audio attribué à la DRH du MEPU-A : « un audio attribué à la directrice des ressources humaines du MEPU-A invitant les IRE à remonter la liste des enseignants qui n’ont pas répondu présents à l’école après la signature du fameux protocole d’accord de la discorde, de la honte et de l’exclusion. »

Il prévient : « plus vous menacez et intimidez les enseignants, plus ils se révoltent, se radicalisent et durcissent le ton. »

Une grève revendiquée comme largement suivie

Le syndicaliste insiste sur l’ampleur du mouvement : « nous avons réussi à paralyser les cours dans les 33 préfectures de l’intérieur du pays. (…) À Conakry, le bilan est mitigé, nous le savons. (…) Mais nous avons réussi à paralyser les cours dans beaucoup d’écoles de Matoto, Ratoma et Matam. »

Pour lui, cette mobilisation constitue déjà une victoire : « le simple fait d’avoir le courage de déclencher cette grève dans le contexte actuel est déjà une victoire. Réussir à paralyser les 80 % des écoles du pays est un exploit. »

Un message au Premier ministre et au gouvernement

Pépé Michel Balamou assure que cette grève a surpris les autorités : « nous avons aussi montré au Premier ministre Amadou Oury Bah, au ministre du Travail Faya François Bourouno et au ministre Jean-Paul Cedy que celui sur qui ils comptaient pour empêcher la grève n’a pas été à la hauteur. »

Un ministre « rattrapé par le système »

Le syndicaliste dresse un portrait contrasté du ministre Cedy : « sa venue à la tête du MEPU-A avait suscité un grand espoir (…) Mais c’était un feu de paille. Le système a eu finalement raison de lui. Il a sacrifié sa rigueur et ses compétences sur l’autel des délices du pouvoir et est devenu de nos jours plus politique que technocrate. »

Il l’accuse ensuite d’avoir fui ses responsabilités dans le dossier du statut particulier : « il a décliné toutes ses responsabilités face, selon lui, aux montants exorbitants proposés comme primes et indemnités. »

Une expression jugée « très péjorative »

Balamou s’insurge également contre le qualificatif employé dans un communiqué ministériel : « il (…) qualifie les élèves du public (…) de “groupes d’individus”, une expression très péjorative qui ne doit venir de la bouche d’un ministre de la République. »

Une mise en garde claire : le bras de fer va s’intensifier

Le syndicaliste met en garde : « le ministre Cedy s’est inscrit dans la dynamique de la confrontation et de l’épreuve de force avec nous. (…) Nous allons l’affronter jusqu’à son dernier retranchement et exiger son départ à la tête du MEPU-A. »

Il annonce un durcissement du mouvement : « nous allons durcir le mot d’ordre de grève la semaine prochaine. »

Un appel direct au président de la République

Pépé Michel Balamou conclut en interpellant le chef de l’État : « c’est pourquoi nous demandons vivement au président de la République de prendre les choses en main. Ses ministres chargés de la gestion de ce dossier ont atteint leurs limites (…) Il est le père de la Nation et il a besoin de stabilité en cette période électorale pour mener paisiblement sa campagne. »

Abdoul Lory Sylla pour guinee7.com