Censure

Droits de l’homme et liberté de la presse en Guinée : Alseny Sall de l’OGDH s’exprime sans détour

Alseny Sall, responsable de la communication à l’organisation guinéenne de défense des droits de l’homme et du citoyen (OGDH), a accordé une interview à notre rédaction. Dans cet entretien, cet activiste des droits de l’homme a commenté le passage de la Guinée à l’examen périodique universel des droits de l’homme, mais il a aussi touché du doigt la situation de la liberté de la presse en Guinée. Lisez !

Guinee7.com : C’est quoi l’examen périodique universel des droits de l’homme ?

Alseny Sall : L’examen périodique universel est un mécanisme créé par le Conseil des droits de l’homme de l’ONU, principal organe de promotion des droits de l’homme de l’organisation. Il vise à instaurer un cadre de dialogue périodique entre les États membres de l’ONU et un État partie aux traités fondamentaux des droits de l’homme afin de mesurer les progrès réalisés et les défis rencontrés en matière des droits de l’homme. À ce titre, au terme de chaque dialogue, il y a des recommandations qui sont adressées à l’État qui a été examiné afin qu’il s’acquitte correctement de ses obligations internationales en matière de droits de l’homme.

Certes, ces recommandations n’ont pas un caractère contraignant pour l’État qui a été examiné, mais ces recommandations sont importantes dans la mesure où les autres États membres de l’ONU qui ont également l’obligation de veiller au respect des droits de l’homme sont tenus de prendre en compte ces recommandations dans leur collaboration avec cet État. Et cela peut avoir un impact négatif pour l’État examiné dans ses rapports avec les autres États, en ce sens que cela peut le discréditer en termes d’image et lui faire perdre des financements importants, parfois au niveau international.

Quelle appréciation faites-vous du passage du ministre de la Justice et des Droits de l’homme de la Guinée devant le mécanisme de l’examen périodique universel 2025 ? Est-ce que le contenu du discours reflète la réalité ?

C’est le 4ᵉ passage de notre pays devant ce mécanisme onusien depuis 2010. Et, à chaque passage des étapes précédentes, que ce soit en 2010, 2015 ou encore 2020, des recommandations ont été adressées aux autorités de notre pays afin qu’elles prennent les mesures législatives et politiques nécessaires pour rendre effectifs les droits de l’homme conformément aux engagements internationaux que nous avons librement souscrits.

Certes, nous apprécions les efforts que nos autorités ont fournis pour être présentes à ce rendez-vous important pour notre pays, mais pour nous, il ne s’agit pas simplement d’y aller, mais plutôt d’œuvrer en amont à la mise en œuvre correcte des recommandations précédentes, mais aussi de créer un climat favorable à la jouissance des droits fondamentaux de concitoyens. Comme vous le savez, depuis un certain temps, il y a un recul préoccupant de notre pays en matière de droits de l’homme se traduisant notamment par la restriction des libertés et de l’espace civique, le musellement de la presse, l’enlèvement des défenseurs et des voix dissidentes ainsi que le harcèlement judiciaire des acteurs politiques notamment. À ce titre, vous constaterez qu’au terme de ce passage encore, la plupart des recommandations adressées à notre pays vont revenir avec beaucoup d’accentuation, je dirais.

Dans le rapport de RSF 2025, la Guinée a perdu 25 places, elle passe de la 78ᵉ à la 103ᵉ place. Votre réaction ?

Écoutez, nous ne sommes guère surpris de cette situation, car c’est tout simplement le reflet du recul que notre pays continue à enregistrer en matière de liberté de la presse, que je viens de souligner plus haut, se traduisant par un musellement total de la presse aujourd’hui.

Les avocats de Monsieur Thierno Moussa poursuivis dans le dossier du vol de 21 milliards s’insurgent contre la violation du principe de la présomption d’innocence de leur client. Qu’en dites-vous ?

Nous comprenons parfaitement cette préoccupation des avocats de Monsieur Thierno Moussa DIALLO en ce sens que le respect du principe de la présomption d’innocence fait partie des piliers fondamentaux des lois qui gouvernent le procès pénal. Le fait de le présenter publiquement à visage découvert devant la presse alors qu’il n’a pas encore été entendu par un juge constitue une violation de ce principe.

Entretien réalisé par Bhoye Barry pour guinee7.com