Censure

Violences après l’enterrement de Karamo Keita. Le chef de quartier pointé du doigt

Des affrontements ont éclaté ce vendredi 12 septembre 2025 au quartier Simbayah École, peu après l’enterrement de Karamo Keita. La colère des jeunes a conduit à des heurts avec les forces de l’ordre, qui ont fait usage de gaz lacrymogènes pendant que des prières et bénédictions étaient en cours.

Un acte que la famille du défunt dénonce avec fermeté. Selon elle, une telle action n’aurait jamais dû se produire, n’eût été la maladresse du chef de quartier.
« Moi, je ne m’attendais même pas à cela. On a quitté la mosquée, les autres sont partis à l’enterrement. Au retour des jeunes, le chef de quartier était déjà là. Je ne sais pas ce qu’il a dit aux jeunes, qui a fait très mal aux jeunes, ils ont réagi. Et ça a commencé, du gaz partout. Certains ont fait des crises. D’autres sont à l’hôpital, on essaie de voir comment ça va. Il y a des jeunes qui ont été arrêtés, difficilement, on les a relâchés. »

Pour elle, les forces de l’ordre ont failli à leur mission : « ils n’ont pas été professionnels. Nous sommes en deuil. On a perdu notre enfant. On les a appelés pour venir sensibiliser, mais pas faire la guerre. Sensibiliser ne veut pas dire qu’il faut jeter du gaz sur les gens. Je me demande qu’est-ce qu’ils voulaient. Est-ce que vraiment ça vaut la peine ? », s’interroge-t-elle.

Au sujet du chef de quartier, elle revient à nouveau à la charge : « Un père de famille, il est le chef de quartier. Il a eu une famille. Et si on touchait à un de ses enfants, c’est comme ça que ça allait être. Les gendarmes qu’il a amenés, eux, ils pouvaient venir vers nous. Ils ne sont pas venus. Mais d’un coup, on voit du gaz partout. Où on va ? Tu perds ton enfant, tu ne peux pas le pleurer. Tu ne peux pas le pleurer parce qu’on t’a gazé. Pourquoi ? Un chef de quartier, qui est là à nous soutenir. Il est venu l’autre fois, il a parlé, on a cru que oui. Mais aujourd’hui, je l’appelle : Venez, mais vous ne venez pas pour la guerre. Venez, sensibilisez, aidez-nous à sensibiliser les enfants, parce qu’ils sont énervés, c’est normal. Tout le quartier est énervé, c’est normal. Un bandit, un voyou, quelqu’un qui n’a pas d’ambition, qui tue notre enfant, et il [président du conseil de quartier, NDLR] vient dire que lui, il va demander pardon à la famille de Karamo, et qu’on va pardonner pour qu’on le libère. Depuis quand ? Il n’y a pas de loi ? Il est qui, lui, pour dire cela ? Il a fait pour lui. On le remercie. Là, ça se voit comment il gouverne son quartier. Et il a bien fait. »

Un peu plus tôt dans la matinée, une mobilisation pacifique avait pourtant eu lieu : « Aujourd’hui, on a porté des t-shirts où il était écrit « Justice pour Karamo ». On a accompagné le corps de Karamo jusqu’à la mosquée. Personne n’avait des cailloux ni rien. On est partis s’arrêter là-bas, d’autres ont filmé. Et c’est normal, il faut qu’il y ait la justice pour lui. Parce qu’on a tué notre enfant. Et si c’était son enfant qu’on avait tué, qu’est-ce qu’il allait faire ? Pourquoi ils ne se mettent pas à notre place ? Mais on laisse avec Dieu. »

Nos tentatives de rencontrer le chef de quartier sont restées vaines. Après avoir fixé un rendez-vous qu’il n’a pas honoré, il n’a plus donné suite à nos appels.

Au moment de quitter les lieux, plusieurs pick-up de gendarmes étaient encore positionnés sur place, encerclant totalement le quartier.

Abdoul Lory Sylla, pour Guinée7.com