Une photo d’ordures postée sur les réseaux sociaux a suffi à déclencher un débat enflammé. D’un côté, le rappeur MC Fresh, qui dénonce l’insalubrité dans le quartier Dabondy, et de l’autre, le président de la délégation spéciale (PDS) de Matam, qui répond du tac au tac. Une véritable « réponse du berger à la bergère » qui illustre la sensibilité de la question de la gestion des déchets à Conakry.
Il y a environ vingt heures, MC Fresh a partagé sur sa page une image montrant des bacs débordant d’ordures à Dabondy, non loin de l’aéroport. Dans un ton accusateur, il a interpellé les autorités en ces termes : « TOUT LE GOUVERNEMENT PASSE ICI MAIS PERSONNE NE PENSE À NETTOYER ! Nous sommes à Dabondy, à peut-être 1 km de l’aéroport. C’est en Guinée que les ordures peuvent créer des embouteillages. J’ai mal pour mon pays ! »
Le rappeur est allé plus loin en critiquant certaines priorités de l’État : « Les voitures qu’on distribue aux artistes peuvent servir pour payer des poubelles adéquates (on ne voit plus la poubelle car elle est inondée d’ordures) et des pelles et brouettes ! Déjà pourquoi déposer une poubelle sur la seule autoroute nationale ? »
En guise de conclusion, il a lancé un appel à l’action : « Mais c’est trop facile ! Moi seul je peux nettoyer, mais où sont ceux qui mangent l’argent qui devrait servir à faire ce boulot ? Ce pays est très sale ! La Guinée ce n’est pas seulement Kaloum. RÉVEILLONS-NOUS. »
La réplique des autorités locales
S’emparant de la même image, le président de la délégation spéciale de Matam a tenu à livrer sa version. Pour lui, les citoyens ne sont pas exempts de toute responsabilité : « les ordures ne sortent pas toutes seules des maisons pour se retrouver sur nos routes. »
Il a ensuite insisté sur un problème de mentalité : « Le vrai problème n’est pas seulement l’incivisme, mais cette croyance selon laquelle le droit consisterait à ce que d’autres ramassent exprès les ordures qu’on jette n’importe où. Ceux qui agissent ainsi ne rendent pas service à la Guinée. Qu’ils aient le courage de le reconnaître. »
Le PDS a rappelé les dispositifs déjà mis en place dans sa commune : « À Matam, chaque quartier dispose d’une PME avec un contrat signé avec la commune pour l’enlèvement des ordures. C’est un défi que nous relevons ensemble. Alors, si vous voulez donner des leçons, commencez par la bonne pratique : abonnez-vous à une PME, attendez qu’on vienne enlever vos ordures à domicile, et si ce service n’est pas rendu, déposez vos déchets devant chez vous en signe de protestation. Car le droit, c’est d’exiger ce que vous avez payé. »
Enfin, il a défié ses détracteurs à prouver leur exemplarité : « Les ordures, c’est comme l’électricité : ça s’entretient. Et à ceux qui diront le contraire : prouvez-nous vos cartes d’abonnés aux PME et montrez que vous et vos familles êtes de vrais exemples de citoyens responsables. »
Ainsi, une simple photo aura suffi à mettre en lumière les tensions persistantes entre la responsabilité citoyenne et la responsabilité de l’État dans la gestion des déchets.
Abdoul Lory Sylla pour guinee7.com