Censure

La France tarde à féliciter Alpha Condé, Macron dans un dilemme ?

Le silence de la France, ancienne puissance coloniale, face à la réélection d’Alpha Condé, est, on ne peut plus, assourdissant. On se rappelle que ce pays s’était empressé d’afficher sa position publiquement en  prenant « note de l’annonce des résultats provisoires du premier tour de l’élection présidentielle en Guinée par la Commission électorale nationale indépendante le 24 octobre. La France, qui avait déjà exprimé sa préoccupation sur le caractère non consensuel du fichier électoral, partage les interrogations exprimées par l’Union européenne sur la crédibilité des résultats qui devront être levées de façon transparente, dans le cadre d’un dialogue inclusif et du processus prévu par la loi ».

En fait, l’Union européenne, dont la France est l’une des premières puissances -et la tête de pont en Afrique francophone!-, avait auparavant pris « note » aussi des résultats provisoires des élections « bien que le scrutin se soit déroulé dans le calme, des interrogations demeurent quant à la crédibilité du résultat, notamment en ce qui concerne la remontée des procès-verbaux et le décompte final des votes».

A l’évidence, l’Union européenne a fondé son opinion sur les critiques de celui qui, dès le lendemain de la présidentielle, s’était autoproclamé président de la République, attitude antirépublicaine s’il faut le souligner. Pire, Cellou Dalein et ses supporteurs n’ont pu apporter la moindre preuve de leur accusation à l’opinion, encore moins à la Cour constitutionnelle. Où sont les fameux PV « photographiés » par les prétendus observateurs électoraux de l’UFDG, les porte-parole de ce parti ayant soutenu, pince-sans-rire, qu’ils étaient au nombre 32000 ? Et dans l’hypothèse même où ces mystérieux observateurs électoraux, « téléphones androïd » en bandoulière, existeraient réellement, pourquoi, plus de 20 heures après le scrutin, alors qu’il était loisible à chacun d’entre eux de se déplacer dans les zones couvertes par la connexion internet pour transmettre leurs « photographies », ont-ils privilégié les sms, avec tous les risques de manipulation et de torsion de la réalité, compte tenu du fait que la démarche même de l’UFDG privilégiait le « militant » au détriment du citoyen responsable, neutre et objectif ? Notons que, curieusement, et comme par miracle, aucun journaliste présent dans la synergie des radios n’a fait mention de leur présence ! Dès lors, comment peut-on accorder du crédit à de tels résultats fondés essentiellement sur la frustration ? Pour l’anecdote, les connexions internet ont été interrompues plus de 24 heures après la déclaration de Cellou Dalein, suite aux violences qui s’en sont suivies, et donc cet argument serait fallacieux s’il était opposé à un esprit doté d’un minimum de logique. Une analyse sereine et indépendante des résultats, même s’il zozoterait face au taux de participation de Faranah par exemple (100,14%), peut démontrer facilement que le contenu même des résultats publiés par l’UFDG révèle à suffisance leur caractère farfelus, fabriqués de toutes pièces, pour imposer, par la rumeur et la propagande, des chiffres affichés pour donner un semblant de crédit à la « victoire » d’un opposant qui avait décidé provoquer délibérément une crise postélectorale.

A partir de là, la question fondamentale est celle-là : pourquoi un président français qui veut afficher une posture « moralisante » et sérieuse en Guinée peut, à priori, sans aucune vérification, faire sienne d’une telle version cousue de fils blancs, tout en étant conscient qu’il prenait le risque de détériorer, par des messages brouillés, les relations qui doivent exister entre les Etats ?

La position de Macron est d’autant plus fragile qu’il n’est pas le mieux placé pour critiquer le processus électoral guinéen, là son diplomate en chef, Le Drian, se coltine avec d’autres chefs d’Etat que la France se garde bien d’incommoder. Les exemples sont si proches et on peut les citer à foison ! Pire, la messe est dite depuis le 7 novembre dernier : la cour constitutionnelle, au regard des vrais procès-verbaux de la CENI, a validé la réélection d’Alpha Condé.

Mieux, des institutions (CEDEAO, UA), observateurs actifs et témoins oculaires du scrutin, et des chefs d’Etats (Russie, Turquie, Chine, etc.) ont félicité Alpha Condé. Il ne reste pratiquement plus que Macron, pris en tenaille dans un dilemme qu’il aura du mal à résoudre, s’il continue à mettre en avant ses jugements décalés et crypto-personnels.

Ibrahima S. Traoré pour guinee7.com

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