Censure

Affaire fonction publique/ « Si nous n’étions pas en Guinée, M. Koly serait en prison », trouve Ben Daouda Touré

Goépogui Jean Pierre Koly, un activiste, accuse des cadres du ministère de la Fonction publique, de la réforme de l’Etat et de la Modernisation de l’Administration notamment, d’avoir trempé dans le trafic des « numéros matricules » (les embauches dans la fonction publique).  Des accusations qui n’ont pas laissé de marbre Ben Daouda Touré, cadre de ce ministère qui nous a reçu jeudi 29 avril, dans ses bureaux, pour une interview.  

Guinee7.com : Depuis un certain temps, M. Koly passe dans plusieurs émissions pour accuser le ministère de la Fonction publique de « recrutements fantaisistes ». Qu’en savez-vous ?

Ben Daouda Touré : Vous allez noter que je vais parler en mon nom personnel. Parce que ce dont on parle ici est déjà à la justice. Je ne suis pas mandaté par mon département pour commenter ce dossier et je n’ai aussi pas le droit de commenter un dossier qui est à la justice. Mais je vais vous dire ce que j’en sais à titre personnel.

Un jour en 2015, on sortait du conseil de cabinet quand un groupe criait devant le portail de la fonction publique. Je me suis hasardé à demander ce qui se passait ? Ils m’ont dit qu’ils sont des jeunes possédants dans arrêtés d’engagement. Mais qu’ils ne sont pas pris en charge. Personnellement je ne comprenais pas très bien ce que ça voulait dire. Donc, j’ai été informé le ministre Sékou Kourouma [le ministre de la Fonction publique de l’époque], comme quoi, il y avait une manifestation et de l’objet de la manifestation. Séance tenante, le ministre a réuni tous les cadres pour voir ce qu’il fallait faire. N’oubliez pas que M. Sékou Kourouma n’avait été nommé qu’en février 2014. Donc nous étions exactement dans l’année. Alors au cours de cette réunion, on a fait venir quelques membres de ces gens qui manifestaient au dehors. Il y a cinq jeunes qui sont venus. Ils nous ont parlé d’une liste de 5 565 agents qui seraient en possession d’arrêtés. Mais qui ne sont pas pris en charge. Le nombre étant très élevé, on ne pouvait pas trancher. Alors, M. Sékou Kourouma les a calmés en leur disant de rentrer, qu’on va vérifier le dossier. A l’interne, il y a eu plusieurs réunions, le nombre était immense. Ce qu’il faut comprendre à la Fonction publique, c’est qu’on ne crée pas un poste qui ne soit pas budgétisé. C’est-à-dire que tu ne peux pas travailler à un poste où il n’y a pas de salaire. Cela est impossible. Donc on avait ce problème. Deuxièmement : l’échantillon qu’ils nous avaient donné ce jour-là datait de 2005 et d’autres de 2007. Il n’y avait aucun dossier qui datait après 2010. Donc disons que tous les documents que nous avons en échenillage dataient d’entre 2005 et 2007. Ça devenait encore beaucoup plus compliqué. A l’une des réunions, j’ai demandé au ministre Sékou Kourouma, entre 2005 et 2015, parce que nous étions en 2015, il y a eu combien de ministres à la Fonction publique qui n’ont pas pu traiter ce dossier ? J’ai dit moi ça me fait peur. Heureusement, je venais d’arriver en Guinée. On s’est mis à rire. On m’a même traité d’Américain ce jour-là. Mais Sékou Kourouma non plus n’a pas accepté le dossier séance tenante. Il a saisi le conseil des ministres et en l’occurrence le premier ministre, Mohamed Saïd. C’est là-bas que l’ordre a été donné de recevoir les dossiers et de voir ce qu’on pouvait faire pour aider ces jeunes. C’était le langage. Traiter les dossiers et aider les jeunes. C’est ainsi qu’une petite commission de 15 personnes a été formée pour recevoir les dossiers. On s’attendait à 5 565 dossiers comme prévu. Mais à la réception des dossiers, nous avons eu un total de 11 227 dossiers.

La commission n’avait rien à faire que de les regrouper et les traiter. Après analyse, vérification, et croisement, nous avons découvert que ceux qui pouvaient être repêchés à la Fonction publique étaient au nombre de 4 806. C’est ceux-là qui avaient de bons arrêtés et de bons diplômes. On a vu 1271 faux diplômes et 6421 faux actes d’engagements. Donc on a fait le compte rendu. A l’analyse personnelle, c’est qu’il y a eu un ajout de près de 6000 sur les 5000 qu’ils avaient déclarés. Je crois que c’est le problème qui continue aujourd’hui. Ces dossiers sont faux, archifaux et prouvés.

Maintenant comme on nous avait demandé, selon le langage, d’aider les jeunes, on ne les a pas mis à la porte. On a demandé sur place, ceux qui pensent qu’ils avaient un bon arrêté, à ceux-là, il manquait des diplômes. On leur donne le temps d’aller chercher leurs diplômes. Sur ce groupe-là, il y a eu 271 diplômes qui sont venus s’ajouter. Ce qui fait que le total était de 5777 bons arrêtés et bons diplômes. On pouvait plaider pour ceux-là, mais je ne sais pas dans quel sens. Pare qu’il faut retenir cela ; pour entrer à la Fonction publique, soit tu as un décret, ou tu passes par un concours administratif, c’est si un département exprime un besoin. Mais nous en tant que fonction publique, gestionnaire de l’administration publique, on ne recrute pas parce qu’on veut.

C’est quoi alors leur situation maintenant ?

Dans le cas présent. Apparemment personne n’a demandé. Parce qu’ils n’ont passé de concours. Donc il y avait ce problème qui était là. Même avec un bon arrêté et un bon diplôme, personne n’a demandé. Il fallait les affecter où ils pouvaient. Donc on avait ce problème aussi. Néanmoins, il y avait des concours qui se sont passés entre 2016 et 2017, on a casé ces gens-là. Cette décision n’a pas été prise par le ministère de la fonction publique. C’était lors d’un conseil interministériel présidé par le ministre de la justice à l’époque. Pour prendre une décision afin de résoudre le problème.

Alors qu’est-ce qui vous révolte dans les interventions de monsieur Koly ?

Au jour d’aujourd’hui ce qui m’a personnellement révolté, c’est parce que le monsieur qui s’est décidé à tous nous aider. Parce que si moi je suis en Guinée ici, c’est grâce à monsieur Sékou Kourouma qui est parti me chercher aux Etats-Unis et je ne suis pas le seul. C’est ce monsieur qui s’est battu pour dire que le groupe là a été victime d’arnaqueurs on a qu’à arranger. C’est ce monsieur Kourouma qui s’est battu jusque devant le président de la République pour défendre ces dossiers pour trouver une issue. Donc ça me fait mal, qu’on insulte aujourd’hui ce monsieur parce qu’il est décédé. Non ça ne s’est pas passé comme ça. Le monsieur n’a fait que du bien pour lui. On ne salit pas la mémoire d’un ami. Tout cela c’est un problème d’arnaque et de faussaires. Si nous n’étions pas en Guinée, monsieur Koly serait en prison. Parce que nulle part au monde un citoyen ne viendra s’arrêter avec des signatures falsifiées des ministres de la République et sortir à la radio encore pour insulter l’Etat. Ça c’est en Guinée. Et puisque je ne suis pas mandaté, je suis libre aujourd’hui de dire ce que je veux. Parce que je ne parle au nom de personne. Je parle en mon propre nom, Ben Daouda Touré.

A votre avis monsieur Koly défend de faux dossiers ? 

Oui ! Il défend de faux dossiers. Il parle de 2000. Moi dans mon rapport ici, je ne vois aucun chiffre qui correspond à ce chiffre. On dit collectif des 2000. Ils sont tombés du ciel ? Où est ce qu’il les fabrique ? Deuxièmement : Koly est qui en Guinée pour que les agents de l’Etat lui déposent leurs dossiers ? S’il n’est pas un chef faussaire ?

Il dit qu’il représente le collectif… 

D’accord ! Mais est-ce que c’est une ONG ? Il est agréé, il vous a montré son agrément ? Est ce qu’il y a une ONG en Guinée qui s’occupe des faux dossiers ? C’est ce que je dis. Nous sommes dans ça parce que personne ne l’a pas foutu en prison. Personne ne peut se valoir de faux dossiers. C’est très facile de le savoir. Tu peux falsifier la signature ou cachet de n’importe quel ministre, nous on peut le savoir par la date. Par exemple, vous qui êtes assis en tant que simple citoyen, est ce que vous pouvez me dire le jour où l’actuel ministre a pris ses fonctions ? Vous ne le savez pas. Donc si vous falsifiez sa signature, vous allez vous tromper de date. Vous allez trouver à une date où le ministre n’avait signé aucun papier. On sait déjà que c’est faux. C’est un faussaire. Il le sait ! À partir du moment où on n’a pas pris tout le monde, le reste on lui dit pourquoi on n’a pas pris. 

Personnellement je suis passé à la radio. Je suis passé la RTG pour défendre l’affaire de faux diplômes…

Alors pourquoi malgré les communications dont vous parlez, le dossier revient sur la table ?

Parce qu’il a un problème personnel avec des gens dont il ne veut pas dire le nom. Parce que monsieur Koly ne sort jamais pour insulter sauf quand il entend des rumeurs de changement dans le département. C’est-à-dire changement ministériel ou élection présidentielle.

Mais pour l’instant il n’y a pas de remaniement en vue, non?

Si ! Aucun secrétaire général n’a quitté. Aucun chef de cabinet n’a quitté, aucun directeur national n’a quitté. Les départements ne sont pas encore restructurés. C’est cela son objectif. Il est en train de salir des cadres, parce qu’il ne veut pas les voir. Parce que ces cadres ont sorti des documents qui le mettent en cause.

Il met le département au défi d’aller en justice. Qu’en dites-vous ?

C’est pourquoi on m’a demandé de ne pas parler. Je parle à mon nom personnel. Puisqu’il dit avoir déjà déposé sa plainte, nous on attend. On ne discute pas une décision de justice. Arrivé au tribunal, il va parler. Même si on me convoque à la justice, je ne pourrais rien dire. Je ne suis pas responsable ici. Mais je ne peux pas accepter qu’on salisse la mémoire de mon bienfaiteur quand on l’accuse de faux. Combien on n’a pas dit ici qu’il (feu ministre Sekou Kourouma) a embauché ses enfants, même sa femme. Maintenant qu’il est décédé qu’on le laisse se reposer. Un faussaire lui, il vit de ça. Parce que s’il se promène de médias en médias, il y a bien quelqu’un qui paye son transport là.

Une interview réalisée par Abdou Lory Sylla pour guinee7.com

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