Censure

Droit à l’information et liberté de la presse : un combat jamais terminé !

Presse guinéenne

Les combats menés ensemble, à travers les épreuves et le temps, ne s’oublient pas. Ils constituent une réserve d’énergie et d’engagement pour de nouvelles batailles. Obtenir la liberté d’expression en son temps, notamment le droit à une information dans un paysage médiatique pluriel, avec des médias indépendants, n’était pas chose aisée. Nous avons eu l’honneur et la chance de faire partie de cette aventure, conduite par des pionniers tels que Souleymane Diallo avec son groupe de presse Le Lynx-Lance, Aboubacar Sylla avec L’Indépendant-Le Démocrate, ainsi que d’autres titres de référence. Ensemble, ils ont écrit les plus belles et glorieuses pages de la presse libre guinéenne.

Cet héritage, pourtant, n’a été ni sauvegardé ni bien défendu. L’âme de la lutte et l’esprit de sacrifice, portés par un idéal partagé et généreux, n’ont pas survécu à l’instinct de conservation de certains, ni à la résignation d’autres  face aux difficultés de l’inconnu. Il ne faut cependant pas désespérer de voir la presse, confrontée à la plus grave crise de son existence, retrouver son lustre d’antan, et ses acteurs d’aujourd’hui, le courage et l’abnégation de leurs devanciers. Malgré les emprisonnements, les harcèlements judiciaires et les descentes musclées dans les rédactions, la première génération de journalistes et de patrons de presse est restée droite dans ses bottes. Peut-être la nouvelle génération aura-t-elle le sursaut nécessaire, et à temps, pour ne pas sombrer. Il lui appartiendra de lutter et de se reprendre, en respectant une éthique et une déontologie strictes du métier.

En attendant, il faut déplorer les lauriers perdus et s’inquiéter du désert médiatique qui s’étend dans le pays, pendant que les autorités qui avaient pourtant annoncé un grand printemps des libertés, restent indifférentes, et que des acteurs et partenaires jadis vigilants sur les exigences de l’État de droit, en tant que gardiens des acquis démocratiques, observent un silence coupable. Autres temps, autres mœurs…

Si les critiques d’hier sont devenus les acteurs d’aujourd’hui, les pionniers ne doivent pas renier leur passé exigeant,

ni se détourner de l’avenir, alors que chacun se demande quelle en sera la couleur, s’il sera conforme aux attentes ou trahira une fois de plus les espoirs.

D’ici là, la fidélité à l’engagement et l’obstination dans les convictions sont des remparts sûrs contre les faiblesses et les compromissions. La peur ne mène à rien, tandis que la détermination et le courage permettent de repousser toutes les limites et toutes les frontières. Le flambeau a été passé sans avoir préparé la relève des valeurs et de la conscience citoyenne. Il convient donc de redescendre dans l’arène pour poursuivre l’effort interrompu et recommencer un combat que l’on croyait gagné. En réalité, il existe des conquêtes de tous les temps qui concernent toutes les générations. On a le choix de fuir sa responsabilité ou d’assumer ses devoirs.

Nous sommes de ceux qui croient davantage en une destinée commune heureuse qu’au bonheur solitaire dans le désarroi collectif.

Tibou Kamara 

Abdoulaye Condé 

Abdoulaye Sankara 

Membres du Collectif des pionniers de la Presse Indépendante Guinéenne