Après avoir disputé trois matches références contre la Côte d’ivoire, le Cameroun et le Mali, la rencontre de quarts de finale de la Coupe d’Afrique des nations prévue après demain (dimanche), aura valeur de grand test pour le Syli national de Guinée.  Devancée lors des phases éliminatoires et battue par le Ghana au match retour joué à Accra, la Guinée a les moyens de passer ce cap.
Dimanche sera un autre jour, un autre match, un tout autre contexte. Il n’y aura ni seconde chance, ni tirage au sort. L’objectif sera de gagner le droit de jouer enfin cette demi-finale qui fuit le Syli depuis près de 40 ans ou disparaître de cette 30è édition de la CAN. En analysant de près les derniers matches joués par les deux formations et en tenant compte de leurs confrontations directes lors des éliminatoires, on peut s’attendre à un match très rythmé. Mais le Ghana a ses propres failles. Les matches se suivant mais ne se ressemblant pas, si Dussuyer exploite bien les insuffisances des Black Stars, l’espoir est permis.
Le Ghana alterne le 4-4-2 et Le 4-5-1 : Les Black Stars ont une organisation de jeu très solide qu’ils peuvent changer en cours de match en fonction de leurs objectifs. Le 4-4-2 qu’ils adoptent en attaque placée, se transforme rapidement en 4-5-1 lorsqu’ils défendent leur camp, en se replaçant très rapidement tout en exerçant un pressing sur le porteur du ballon adverse. Quand ils « abandonnent » Gyan Asamoah seul en pointe en laissant l’initiative du jeu à l’adversaire, l’idée de base toujours la même : dégarnir la défense d’en face afin d’organiser des contres rapides pour marquer un but. Doté d’une vitesse de course exceptionnelle, Gyan est l’un des joueurs les plus expérimenté et les plus précis du monde. Il faudra donc éviter de tomber dans le piège ghanéen en jouant l’attaque à tout va, sans penser à protéger ses arrières. Car autant les Ghanéens sont dangereux en contre, autant ils sont vulnérables quand ils jouent en attaque placée – surtout avec l’absence de joueurs comme Muntari, Kwadjo Asamoah, Kevin Prince Boateng -, avec une défense qui ne rassure pas toujours. Les joueurs guinéens devront donc être capables d’exploiter rapidement les intervalles dès après la récupération du ballon pour éviter le replacement de l’équipe ghanéenne. Cette phase de jeu nécessite un premier relanceur très précis (Kevin Constant ou Ibrahima Sory Conté) afin de surprendre le collectif ghanéen avant qu’il n’achève son replacement.
En effet, lorsque l’équipe ghanĂ©enne se met en place, on se heurte souvent Ă un groupe homogène capable de boucher tous les espaces et rĂ©cupĂ©rer rapidement le ballon. Mais la GuinĂ©e a du rĂ©pondant avec des milieux de terrain techniques (Constant, ContĂ©, KeĂŻta) capables de provoquer les dĂ©calages nĂ©cessaires pour lancer les attaquants. Quand on observe bien les deux Ă©quipes, il est Ă©vident que toute la bataille sera concentrĂ©e au milieu de terrain. C’est dans ce secteur de jeu que les choix de Dussuyer seront dĂ©terminants.Â
Un bon gardien de but mais sans expĂ©rience : Braimah Razack est un excellent gardien de but et il l’a prouvĂ© durant cette Ă©dition de la CAN. Cependant sur quelques sorties aĂ©riennes, il a commis des erreurs qui, bien Ă©tudiĂ©e Ă la vidĂ©o, peuvent permettre Ă un attaquant concentrĂ© de lui marquer un but opportuniste. Ces « absences » de Razack doivent pouvoir profiter au Syli.Â
Une dĂ©fense bien organisĂ©e mais rugueuse : Les attaquants guinĂ©ens devront s’attendre Ă un traitement de choc au niveau de l’axe central de l’équipe ghanĂ©enne. Les latĂ©raux des Black Stars sont plus des poètes mĂŞme si Amarteh, contrairement Ă Afful, n’est pas toujours un tendre. Cependant, en restant concentrĂ©s sur le match, les joueurs guinĂ©ens ont une belle carte Ă jouer au niveau de l’axe central qui, par moment, fait des relances approximatives. Le cĂ´tĂ© droit de la dĂ©fense ghanĂ©enne peut ĂŞtre exploitĂ© sur les montĂ©es d’Atsu, un arrière latĂ©ral parfois trop offensif. John Boye, s’il est titularisĂ©, peut commettre des fautes inutiles (une faille que l’avant-centre Ă son contact peut exploiter). C’est un joueur qui a souvent les nerfs Ă fleur de peau.Â
Museler les attaquants GhanĂ©ens : C’est la tâche la plus difficile qu’on peut demander Ă une Ă©quipe guinĂ©enne qui a prouvĂ© qu’elle a du mal Ă dĂ©fendre – cette insuffisance est souvent compensĂ©e par des joueurs au caractère bien trempĂ©. La mission sera encore plus difficile si Dussuyer commet l’erreur de titulariser Issiaga Sylla, très peu rassurant dans cette CAN. Non pas que Sylla ne soit pas un très bon joueur (il a d’ailleurs prouvĂ© qu’il avait beaucoup de valeur contre le Cameroun), mais nous avons la nette impression qu’il est comme tĂ©tanisĂ© par l’enjeu des matches. Un problème mental est une question personnelle : chaque footballeur qui foule une pelouse doit avoir pleinement confiance en ses moyens. BassaĂŻma Sankoh doit aussi amĂ©liorer son placement dans l’axe central de la dĂ©fense guinĂ©enne. La tâche la plus difficile incombera Ă FodĂ© Camara qui sera sans doute le garde du corps de Gyan. Il ne faut surtout pas que nos latĂ©raux se laissent prendre de vitesse par les dribbles de Jordan ou AndrĂ© Ayew ou d’Atsu, le plus percutant des techniciens ghanĂ©ens.Â
Comprendre qu’il s’agit d’un match de Coupe : Les joueurs du Syli doivent comprendre qu’un quart de finale (à élimination directe) est un match de Coupe où il ne peut y avoir de favori. Ils doivent donc entrer dans leur match dès les premières secondes de jeu (les Ghanéens voudront faire la même chose) et rester concentrés pendant au moins 90mn – si la décision se fait dans le temps réglementaire. Le Ghana est une très grande équipe de football mais il n’a pas présenté cette année 2015, la meilleure formation qu’il puisse aligner dans cette CAN. Ce n’est pas le cas de la Guinée qui, même avec quelques absences sur blessures (notamment dans le secteur défensif), dispose de la quasi-totalité de son potentiel. En plus, Dussuyer a un joker : François Kamano. Nous continuons de croire qu’il est temps qu’on le lance dans le grand bain.
Cela dit, tout sera une question de mental : commencer la partie avec une réelle envie, se battre sur tous les ballons (ce qui surprendra forcément les Ghanéens qui sont « sûrs » de leur victoire, en tenant compte des résultats des matches précédents contre la Guinée), bref sortir ses tripes pour passer ce cap incontournable. A cœur vaillant rien d’impossible. Tout est une question de volonté.
Saliou Samb