Ce dimanche 11 mai restera gravé dans la mémoire collective des habitants de Fria. Une pluie diluvienne, accompagnée de rafales de vent d’une rare violence, s’est abattue sur la ville, provoquant des dégâts matériels d’une ampleur inédite. Des arbres déracinés, des habitations éventrées, des véhicules endommagés, des murs effondrés, des routes devenues impraticables… Le décor d’après-tempête est celui d’un chaos douloureusement palpable.
De mémoire de Friaka, jamais la ville n’avait connu une telle désolation consécutive à un phénomène naturel. Et pourtant, certains signes avant-coureurs étaient bien là. Une chaleur suffocante, inhabituelle pour la saison, s’était installée ces derniers temps, comme une alerte muette. Les plus anciens s’en émeuvent : ‘‘À certaines périodes de l’année, notamment en décembre, les enfants ne pouvaient se rendre à l’école sans enfiler de gros pulls. À l’époque, nous allumions des feux dans la cour de l’école pour nous réchauffer les mains avant de rentrer en classe’’, se remémore avec émotion un habitant d’une cinquantaine d’années.
Mais que s’est-il donc passé pour que Fria, jadis bercée par un climat tempéré, se retrouve aujourd’hui au cœur d’un déséquilibre aussi brutal ? La réponse, sans équivoque, pointe vers les agissements irresponsables de l’homme face à la nature. Les forêts environnantes, qui jadis formaient une ceinture protectrice autour de la ville, sont désormais réduites en cendres, sacrifiées sur l’autel du charbon de bois. À cela s’ajoute une exploitation minière galopante, portée par l’arrivée de nouvelles sociétés qui, sous couvert de développement, bafouent allègrement les prescriptions du code de l’environnement. Le reboisement des zones exploitées, pourtant obligatoire, est devenu une exception.
Comme si cela ne suffisait pas, Fria subit de plein fouet les conséquences des émissions de poussières industrielles. Un rapport du ministère de l’Environnement et du Développement durable est sans appel : les normes de rejets atmosphériques ne sont pas respectées par l’usine locale. Les dépôts de poussières d’alumine, visibles à l’œil nu, en sont les tristes témoins. Les témoignages des riverains confirment ce que les analyses scientifiques dénoncent déjà : l’environnement de Fria est à l’agonie.
Ainsi, la ville ne paie pas seulement le prix d’une catastrophe naturelle imprévisible, mais bien celui d’un effondrement écologique programmé. La nature, bafouée, réagit désormais avec violence. Et c’est une ville entière qui en paie les conséquences.
Ibrahima S. Traoré pour guinee7.com