Depuis plusieurs mois, les habitants de la Cité de l’alumine vivent sous un nuage oppressant d’alumine. Une situation qui pousse de nombreux citoyens à briser le silence. En cet après-midi du Mardi 16 Décembre, certains d’entre eux ont accepté de se confier, la colère mêlée à la peur. Au grand marché de la ville, sous les étals, sur les sacs de riz, les légumes et les fruits exposés, une fine poussière blanchâtre s’invite partout.
« On vend la poussière avec nos marchandises », lâche Assiatou Sow, vendeuse de condiments depuis plus de vingt ans. Devant son étal, elle tente en vain de protéger ses produits. « S’ils (Rusal-Friguia) veulent qu’on meurt avec nos nourritures, poursuit-elle. Qu’il en soit ainsi. Au temps de Lansana Conté, on ne connaissait pas cela. Que l’État nous aide avant qu’il ne soit tard. »

À quelques mètres, Mouhamadou Bah, père de famille et commerçant, redoute surtout pour la santé.
« On est tous malades, petits et grands. Nous souffrons avec la poussière d’alumine. Quand tu entends je vais aux élections pour voter c’est parce que tu te sens bien. Notre quotidien est rythmé par le port des bavettes, la prises des comprimés et du sirop. »

Plus loin, assise à l’ombre d’un parapluie, M’Mahawa Sylla, vendeuse de poisson, peine à cacher son désarroi.
« Cette matière utilise la soude, quand on l’inhale on tombe malade. On est accablés. Même notre nourriture nous inquiète. On se sent abandonnés. Que le président prenne des dispositions. »

Juste à coté du marché se trouve le stade municipal. Abdoulaye Camara, entraîneur témoigne : « C’est inexplicable ! On entraîne les enfants sous cette poudre blanche. Ça nous rend malade. C’est avant-hier je suis sorti de l’hôpital. Fria souffre et ça se ressent partout. »

Ces témoignages traduisent un malaise profond : celui d’une population qui a le sentiment de servir de variable d’ajustement à une industrie pourtant censée être le poumon économique de la ville. À Fria, la richesse industrielle contraste désormais avec la précarité sanitaire et sociale des habitants.
Ici, la pollution n’est plus un sujet abstrait : elle se voit, se respire et se subit au quotidien.
Alh Cheick envoyé spécial de guinee7.com

