Ira ou n’ira pas ? Que dit la loi ? Comment garantir une alternance dĂ©mocratique malgrĂ© la prolifĂ©ration des sirènes rĂ©visionnistes ? Quel rĂ´le pour la sociĂ©tĂ© civile et la classe politique pour casser le lĂ©gendaire pouvoir Ă vie dans notre pays ? L’opposition, pour une fois parviendra t-elle Ă crĂ©er une alternance civile et dĂ©mocratique ?
Au crĂ©puscule du second et dernier mandat du PrĂ©sident Alpha CondĂ©, conformĂ©ment Ă notre constitution en vigueur, le dĂ©bat se crispe autour d’une Ă©ventuelle volontĂ© de ce dernier de modifier cette dernière afin de pouvoir briguer la magistrature suprĂŞme après avoir passĂ© deux mandats Ă la tĂŞte du pays.
Craintes ou supputations ?
Le Chef de l’État n’a jamais dit qu’il veut un 3ème mandat. Et il n’a non plus dit le contraire. Mais il entretient toujours ce mystère sur son Ă©ventuel maintien ou dĂ©part du pouvoir en 2020.
Ă€ ses propres dires, « c’est le peuple qui dĂ©cidera au moment venu ». Ou quand il dĂ©clare que c’est Ă l’Afrique de choisir son modèle de dĂ©mocratie et qu’il n’a de leçons Ă recevoir de qui que ce soit. C’est douteux et c’est suspicieux. L’appĂ©tit est sans fin.
Le doute sur la volontĂ© du PrĂ©sident de tripatouiller la constitution et mettre de cĂ´tĂ© le verrou de l’intangibilitĂ© constitutionnelle sur la limitation du mandat en son article 154, enfle de plus en plus après la très controverse sortie du diplomate russe Ă l’occasion de la cĂ©rĂ©monie de prĂ©sentation des vĹ“ux du nouvel an au PrĂ©sident guinĂ©en.
Au regard de la situation socio-politique actuelle, qui pour empêcher un 3ème mandat pour Alpha Condé ? Faut-il réellement compter sur le peuple ?
Les obstacles majeurs pour crĂ©er l’alternance ? Connaissant l’histoire de ce peuple, il n’y a jamais eu un ancien PrĂ©sident  dans ce pays. Tous ont Ă©tĂ© Ă vie. 26 ans pour le premier et 24 ans pour le deuxième. Les autres Ă©taient une parenthèse de l’histoire.
La rĂ©signation du peuple pourrait conduire Ă un maintien Ă vie de Pr. Alpha CondĂ©. Il faut rĂŞver debout pour voir le peuple dans la rue pour demander le dĂ©part du PrĂ©sident. Il accepte tout et sans condition. Il est profondĂ©ment enracinĂ© au pouvoir divin. Ici, c’est Dieu qui donne le pouvoir et il le reprend quand il veut. Alpha a dit au foutah que c’est Dieu qui donne le pouvoir et il le retire quand il veut. Bien avant lui, SĂ©kou et ContĂ© l’ont dit.
Le manque d’engagement citoyen est un vĂ©ritable obstacle pour crĂ©er une alternance en 2020. L’Ă©chec des forces sociales sur la demande de rĂ©duction du prix des produits pĂ©troliers ou le faible soutien des citoyens quand il a Ă©tĂ© question de manifester pour le retour de KĂ©lĂ©fa Sall Ă la Cour Constitutionnelle et d’autres cas, sont des illustrations parfaites.
L’autre difficultĂ© , le prĂ©sident bĂ©nĂ©ficie de deux soutiens de taille. La Chine et la Russie. Des pays qui ont toujours Ă©tĂ© de près depuis notre accession Ă l’indĂ©pendance et qui ont contribuĂ© au maintien des deux premiers rĂ©gimes malgrĂ© la farouche opposition des puissances occidentales de tendance libĂ©rale et dĂ©mocratique. Le pays est dans les mains des conglomĂ©rats chinois et russes qui tirent pleinement profit de l’exploitation minière dans le pays.
Et l’Ă©clatement de la classe politique, l’hypocrisie des Ă©lites et le militantisme de la sociĂ©tĂ© civile sont des facteurs qui seront sans doute en faveur d’un possible maintien du pouvoir actuel en 2020.
Mais comment altĂ©rer Ă l’alternance ?
Il faut impĂ©rativement pousser la rĂ©flexion. Et deux options imminentes s’imposent.
- Primo : La renaissance des forces vives.
Ceci est d’une nĂ©cessitĂ© plus qu’impĂ©rieuse. Toutes les forces rĂ©publicaines du pays doivent se retrouver au sein d’une plate-forme citoyenne Ă l’image de 2007 pour contraindre le pouvoir central de quitter Ă temps sans compromettre l’Ă©lan dĂ©mocratique en cours dans le pays depuis 2010. Mettre les Ă©gos de cĂ´tĂ© et trouver un candidat unique, consensuel derrière lequel un bloc se forme sur la base d’un contrat commun.
- Décimo: Opter pour un vide juridique mais avec un risque énorme.
Cette alternative est dangereuse et compromettante. Un quelconque glissement de calendrier ne pourrait ĂŞtre en faveur des tĂ©nors de l’opposition qui ont un âge très avancĂ© et qui jouent la dernière carte de leur destin prĂ©sidentiel. C’est maintenant ou jamais. Perdre pour compromettre davantage ou on gagne pour tout sauver sans aucun esprit Ă©goĂŻste ? C’est lĂ oĂą se situe le problème.
Ă€ mon entendement personnel, la rupture est nĂ©cessaire en 2020. Et cela, ne dĂ©pend pas seulement d’une force. Il faut une unitĂ© plurielle pour une convergence commune. C’est-Ă -dire, aboutir Ă une alternance vaille que vaille et coĂ»te que coĂ»te.
Sans cela, il aura un perdant ( opposition républicaine ou plurielle avec le peuple ) et garantira  la continuité légendaire dans la tranquillité sans alternance(pouvoir).
Jusqu’Ă preuve du contraire, l’alternance est bien possible pour le bien de tous et de chacun pour une dĂ©mocratie constante et dynamique.
Quelle bĂŞtise faut-il Ă©viter par l’actuelle classe politique ?
C’est une hypothèse bien possible mais Ă ne point mettre en exergue. C’est permettre le retour des militaires au pouvoir. Ce scĂ©nario Ă ne pas exclure serait très nuisible pour notre dĂ©mocratie et va enterrer tous ces opposants qui seront inaptes de diriger de manière lucide et efficace. Et rien ne garantira avec une telle option, qu’après c’est Cellou ou Sidya encore moins KouyatĂ© qui sera PrĂ©sident.
Le meilleur pour le pays serait de provoquer une alternance intelligente et Ă temps. C’est au Chef de l’État d’ĂŞtre du cĂ´tĂ© de l’histoire et non des histoires de nature Ă compromettre notre vivre ensemble et dĂ©construire tout espoir de dĂ©mocratie.
L’alternance en 2020 est bien possible. Et il faut Ă©viter le sens interdit.
Par Habib Marouane Camara
Journaliste et Analyste Politique.
habibmarouanecamara@gmail.com