Censure

Recrutement de 10 mille jeunes, ENA, accords avec le syndicat : Le ministre de la Fonction publique dit tout (grande interview)

La rĂ©forme de l’administration publique avance Ă  pas sĂ»rs. Les obstacles sont certes multiples, mais le ministre SĂ©kou Kourouma en fait un dĂ©fi Ă  relever. Par ses projets et ses stratĂ©gies, il joue son va-tout pour combler le manque Ă  gagner, rattraper le retard et remettre le fonctionnaire guinĂ©en au travail.

En 2015, vous avez initiĂ© un projet de rĂ©forme de la Fonction publique Ă  travers le rajeunissement, la fĂ©minisation et la modernisation de l’administration. OĂč en ĂȘtes-vous avec ce projet?

SĂ©kou Kourouma : Rajeunir et fĂ©miniser l’administration est un projet qui a Ă©tĂ© initiĂ© avec la mission de coopĂ©ration de l’ambassade de France pour donner du sang neuf, renforcer les capacitĂ©s humaines et favoriser la modernisation de l’administration. A l’origine, il Ă©tait prĂ©vu que 1.200 jeunes fonctionnaires soient recrutĂ©s, formĂ©s et rompus Ă  la pratique du management public. Alors, le projet a bien dĂ©marrĂ©. La premiĂšre annĂ©e,    il y a eu le recrutement de 400 jeunes et la deuxiĂšme annĂ©e 400 autres qui ont Ă©tĂ© formĂ©s avec la collaboration de Sciences Po de Bordeaux. A la troisiĂšme annĂ©e, il y a eu un handicap majeur liĂ© Ă  l’émergence d’Ebola et le projet a eu une rupture. Aujourd’hui, avec la fin de l’épidĂ©mie, le projet  reprend. Un concours de recrutement est prĂ©vu pour la 3e promotion est  prĂ©vu au courant mai 2016. Les activitĂ©s doivent redĂ©marrer au plus tard en juin.  Pendant ce temps, nous nous battons pour responsabiliser les jeunes certifiĂ©s dans les diffĂ©rents postes de responsabilitĂ© au sein des diffĂ©rentes administrations centrale et dĂ©concentrĂ©e. Parce que c’est aussi une exigence du projet, quand les jeunes sont formĂ©s, il faut valoriser leurs compĂ©tences en leur confiant des responsabilitĂ©s. Ils vont constituer  un peu cette gĂ©nĂ©ration des jeunes fonctionnaires du changement. On commence par un noyau et progressivement le cercle grandit. C’est une masse critique qu’on injecte dans les diffĂ©rentes administrations. Je crois que mĂȘme l’Union europĂ©enne sera intĂ©ressĂ©e Ă  intervenir dans ce projet, parce que nous avons une fonction publique trĂšs vieillissante. Dans les 7 Ă  10 ans qui viennent plus de la moitiĂ© des effectifs actuels va partir Ă  la retraite.

 Il  avait Ă©tĂ© annoncĂ© le recrutement de 10.000 jeunes fonctionnaires. Est-ce que cela est effectif aujourd’hui?

Effectivement en 2015, avec les rĂ©sultats du recensement biomĂ©trique, le gouvernement s’est engagĂ©, dans le cadre du rajeunissement de la fonction publique, Ă  recruter 3.500 agents pour le compte de l’enseignement prĂ©-universitaire, 500 pour le compte de l’enseignement technique et professionnel, 392 pour l’enseignement supĂ©rieur, 2.000 pour la santĂ©, 631 pour la police et 1.193 pour l’environnement.  Avec la crise due Ă  Ebola et au regard de la raretĂ© des ressources budgĂ©taires, il ne nous a pas Ă©tĂ© possible d’organiser cette sĂ©rie de concours tant attendue par les jeunes. En fin de compte, c’est le ministĂšre de l’Enseignement supĂ©rieur qui a bĂ©nĂ©ficiĂ© de la mesure de recrutement. Tandis qu’au compte du ministĂšre de la SantĂ©, le concours a Ă©tĂ© organisĂ©. Et prĂšs de 17.000 dossiers de candidature ont Ă©tĂ© enregistrĂ©s. Lorsqu’on a traitĂ© ces dossiers, il y a eu prĂšs de 18.000 faux diplĂŽmes qu’on a Ă©liminĂ©s. Les corrections sont en cours et avant la fin de l’annĂ©e, nous allons publier les rĂ©sultats de ce concours pour le compte de la santĂ©,  pour en assurer la prise en charge dans le cadre du renforcement du systĂšme national de santĂ©. Dans le mĂȘme ordre d’idĂ©e, l’éducation devait   bĂ©nĂ©ficier de l’organisation du concours de recrutement pour satisfaire les nombreux besoins en personnel enseignant. LĂ  aussi, nous avons fait appel Ă  candidature. Plus de 42.000 dossiers de candidature ont Ă©tĂ© collectĂ©s en 2015. Ces dossiers sont en traitement parce que nous prenons les diplĂŽmes, nous les envoyons aux universitĂ©s qui les ont dĂ©livrĂ©s. Ces universitĂ©s en retour nous envoient des certificats d’authenticitĂ© de ces diplĂŽmes pour valider la candidature des uns et des autres. A ce jour, nous attendons impatiemment les crĂ©dits budgĂ©taires pour pouvoir organiser dans les meilleurs dĂ©lais le concours de recrutement  de 3.500 jeunes pour le compte de l’enseignement prĂ©-universitaire et les 500 jeunes de l’enseignement professionnel. Je voudrai rassurer les jeunes diplĂŽmĂ©s en quĂȘte du premier emploi qui ont dĂ©posĂ© leurs candidatures en 2015 que dans les meilleurs dĂ©lais, nous allons disposer des crĂ©dits budgĂ©taires pour pouvoir organiser ce concours tant attendu.

Quel est le coût de ces recrutements que vous énumériez tantÎt?

Le coût  budgétaire va dans les 4 milliards de FG pour cette série de concours.

Vous envisagez de recrutement Ă  la fonction publique et on sait qu’il y a des contractuels au sein de  l’administration publique. Est-ce que vous avez pensĂ© Ă  ces gens-lĂ  ?

Nous avons une fonction publique hybride qui prend en charge Ă  la fois l’aspect carriĂšre, mais aussi l’aspect fonction publique d’emploi. D’un cĂŽtĂ©, nous avons des fonctionnaires qui passent toute leur carriĂšre dans la fonction publique, mais Ă©galement, il y a d’autres catĂ©gories d’agents qu’on appelle les contractuels. Il y a les contractuels permanents qui sont constituĂ©s de personnels auxiliaires qui mĂšnent des activitĂ©s d’appui pour faciliter l’exĂ©cution des missions. Il y a aussi les contractuels temporaires dont les niveaux varient qui, pour des besoins ponctuels, sont recrutĂ©s pour une durĂ©e dĂ©terminĂ©e. Lorsqu’on a plus besoin d’eux, on met fin au contrat. 

C’est bon de recruter des cadres, mais  dans ce monde en perpĂ©tuelle mutation technologique. Est-ce que vous avez pensĂ© au perfectionnement des fonctionnaires de l’administration publique?

Il y a plusieurs initiatives en cours dans le cadre de la problĂ©matique de renforcement des capacitĂ©s des agents de l’administration publique. Vous avez le Centre de perfectionnement administratif (CPA) qui dĂ©veloppe d’intenses activitĂ©s de perfectionnement pour mettre Ă  jour  les niveaux de connaissance, les aptitudes des fonctionnaires pour les adapter au milieu de travail et Ă  l’évolution de la situation des emplois. L’annĂ©e derniĂšre, le CPA a eu Ă  former plus de 3.000 cadres de toutes catĂ©gories de corps confondus dans divers domaines de l’administration. Il y a Ă©galement au niveau de renforcement des capacitĂ©s, et surtout dans le cadre de la professionnalisation de l’administration, le projet de l’Ecole nationale d’administration (ENA) qui est aussi créée et qui va utiliser les mĂȘmes locaux que le CPA en attendant la construction du campus Ă  KĂšnĂšndĂ©, Ă  DubrĂ©ka. LĂ , nous sommes en nĂ©gociation avec la Banque mondiale et l’Ecole nationale d’administration publique (ENAP) du Canada pour dĂ©velopper un programme de formation Master en administration publique. Dans le cadre de ce partenariat, l’ENAP accepte de dĂ©localiser son programme de Master en administration publique pour le diffuser en GuinĂ©e au compte de l’opĂ©rationnalisation du projet ENA. Ça consiste Ă  recruter au moins une trentaine de jeunes titulaires de la License ou du Master   qui vont faire un concours de recrutement pour entrer Ă  l’ENA. Les Ă©preuves seront choisies par l’ENAP du QuĂ©bec. Les cours seront dispensĂ©s par les professeurs de l’ENAP du QuĂ©bec. Des cours prĂ©sidentiels c’est-Ă -dire les professeurs vont venir dispenser des cours  en GuinĂ©e. Ils vont aussi dispenser des cours d’enseignement Ă  distance. Le diplĂŽme qui va ĂȘtre dĂ©livrĂ© aprĂšs les deux ans de formation, c’est le diplĂŽme de Master de l’ENAP du QuĂ©bec  qui est une institution de type universitaire. Donc, nous sommes trĂšs avancĂ©s dans les nĂ©gociations avec l’ENAP du QuĂ©bec pour recruter la premiĂšre promotion de l’ENA en administration pour le diplĂŽme de Master. A cet effet, Monsieur le Premier ministre, chef du gouvernement a adressĂ© un courrier tout derniĂšrement Ă  la Banque mondiale pour aider Ă  financer ce projet. L’autre volet de renforcement des capacitĂ©s, c’est au niveau du secrĂ©tariat national de renforcement des capacitĂ©s. LĂ  Ă©galement, c’est une initiative qui est soutenue par la Fondation africaine pour le renforcement des capacitĂ©s. Une mission de cette fondation a sĂ©journĂ© la semaine passĂ©e Ă  Conakry et a dĂ©marchĂ© dans les diffĂ©rents ministĂšres et dans les diffĂ©rents secteurs pour connaitre les prioritĂ©s nationales en termes de renforcement des capacitĂ©s. Cette institution va recruter dans les mois qui viennent des experts qui vont venir en GuinĂ©e pour identifier les besoins en renforcement des capacitĂ©s et mettre en place un programme multisectoriel de renforcement des capacitĂ©s et qui prendra en charge les besoins du secteur publique, du secteur privĂ© et de la SociĂ©tĂ© civile. VoilĂ  les initiatives pour combler les insuffisances en termes de renforcement des capacitĂ©s.

Dans le mĂȘme sillage, la premiĂšre promotion qui avait bĂ©nĂ©ficiĂ© d’une formation des formateurs a effectuĂ© un voyage au Canada. OĂč en sommes-nous avec ce projet parce qu’il Ă©tait prĂ©vu trois promotions?

Il s’agit d’une dizaine de hauts cadres guinĂ©ens qui ont reçu une formation des formateurs en management public. Ces formateurs sont lĂ  disponibles et lorsque le programme de Master va dĂ©buter, les professeurs de l’ENAP qui vont venir vont travailler avec ces professeurs. En mĂȘme temps, nous allons bĂ©nĂ©ficier du transfert des compĂ©tences et de la technologie.

Vraiment vous avez lĂ  des projets trĂšs ambitieux pour la rĂ©forme de l’administration publique. Mais il y a un autre fait qui caractĂ©rise les cadres guinĂ©ens. C’est l’absentĂ©isme et le retard dans les services. Certes vous disposez maintenant  de la pointeuse Ă©lectronique par endroits. Est-ce que cet appareil a permis de changer les  habitudes?

Avec la mauvaise gouvernance, on a banalisĂ© l’absentĂ©isme au travail comme si la fonction publique est un foutoir oĂč on peut venir quand on veut comme on veut et s’absenter comme on veut et quand on veut. Je crois qu’il faut une rupture totale avec cette pratique et cette mentalitĂ©, parce que le fonctionnaire est redevable vis-Ă -vis de l’Etat et des populations qui paient leurs rĂ©munĂ©rations. L’absentĂ©isme a Ă©tĂ© si banalisĂ© qu’à la faveur des rĂ©formes en cours, nous avons bĂ©nĂ©ficiĂ© de l’accompagnement de la Banque mondiale qui nous a dotĂ©s Ă  titre expĂ©rimental de 125 pointeuses Ă©lectroniques. Alors, de dĂ©cembre 2015 jusqu’en mars 2016, nous avons organisĂ© l’opĂ©ration de contrĂŽle permanent dans l’ensemble des services publics. Parce qu’au moins chaque administration rĂ©gionale, prĂ©fectorale et centrale a Ă©tĂ© dotĂ©e d’une ou de deux pointeuses Ă©lectroniques.  Pendant 3 mois, nous avons recrutĂ© des jeunes diplĂŽmĂ©s qui ont travaillĂ© dans les diffĂ©rents services publics et qui ont procĂ©dĂ© au pointage systĂ©matique de l’ensemble des fonctionnaires. Soit le pointage se fait dans le registre si l’agent n’est pas encore recensĂ©, soit avec la machine Ă©lectronique, si l’agent est enrĂŽlĂ©. Cela a donnĂ© des rĂ©sultats parce qu’on n’a pas encore officialisĂ© les rĂ©sultats. Mais on a plus de 2000 agents fictifs qui Ă©taient lĂ  encore aprĂšs le recensement biomĂ©trique et qui percevaient des salaires ; soit des gens dĂ©cĂ©dĂ©s, soit des gens en abandon de postes qui avaient quittĂ© l’étranger pour venir se faire recenser et repartir. Donc, ce contrĂŽle permanent, nous voulons l’intensifier et le pĂ©renniser. En quoi faisant? Il faudrait que l’Etat mette la main Ă  la poche pour acheter davantage plus des pointeuses Ă©lectroniques pour fournir le plus petit service en vue de cultiver un comportement professionnel adĂ©quat et appropriĂ© au niveau des fonctionnaires et pour lutter contre l’absentĂ©isme. LĂ  aussi, je crois qu’avec la Banque mondiale nous sommes en discussion pour nous doter de prĂšs de 350 pointeuses Ă©lectroniques  qui vont ĂȘtre rĂ©parties dans l’ensemble des services publics pour systĂ©matiser le pointage Ă©lectronique qui va ĂȘtre  obligatoire tous les jours Ă  l’arrivĂ©e et au dĂ©part. Mais, il s’agit d’abord d’avoir un nombre suffisant pour le systĂ©matiser.

Est-ce qu’il y a une autre mĂ©thode que vous envisagez pour lutter contre l’absentĂ©isme et le retard parce que les gens peuvent venir le matin pointer et quitter pour revenir le soir se soumettre au mĂȘme exercice?

Le problĂšme est trĂšs difficile, mais les cadres guinĂ©ens chargĂ©s de gĂ©rer les ressources humaines ne prennent pas toujours leurs responsabilitĂ©s. Je ne parle pas des gestionnaires des ressources. Je parle des  chefs de service. Depuis les ministres, le chef du dĂ©partement, les secrĂ©taires gĂ©nĂ©raux, les directeurs nationaux, les chefs de division, de section. Chacun est responsable d’une unitĂ© de service. Chacun a la responsabilitĂ© sur un certain nombre d’agents publics mis Ă  disposition. Il revient aux directeurs gĂ©nĂ©raux, aux chefs de division de mettre la rigueur sur le contrĂŽle et exiger que les gens soient lĂ  Ă  l’heure et pendant toute la durĂ©e du travail. Mais les gens ne prennent pas leurs responsabilitĂ©s. Cela n’est pas le rĂŽle du gestionnaire des ressources humaines. Les premiers gestionnaires des ressources humaines  c’est d’abord le chef du gouvernement, le ministre qui assure sous sa responsabilitĂ© des agents soumis Ă  son contrĂŽle et qui ont obligation de produire des rĂ©sultats. Chacun, Ă  un niveau donnĂ©, est responsable de la marche du service. Mais dans notre administration, il y a un certain laisser-aller. Les chefs de service laissent les gens venir et repartir quand ils veulent. Quand ils viennent on ne leur donne pas du travail. Il y a encore beaucoup Ă  faire. Il faut un travail de rationalisation. Mais Ă  cĂŽtĂ©, il faut encore de la rigueur et de la fermetĂ©.

Dans le cadre de l’assainissement du fichier administratif des fonctionnaires il a Ă©tĂ© instaurĂ© le recensement biomĂ©trique. Quels sont les rĂ©sultats obtenus?               

J’avoue qu’on est en train de finaliser le dossier. Le recensement biomĂ©trique a dĂ©butĂ© en janvier 2014 avec pour objectif  assainir, harmoniser, intĂ©grer et sĂ©curiser les fichiers de gestions administratives et salariales. Au dĂ©part, nous avons visĂ© un peu plus de 101.000 fonctionnaires. Il en a rĂ©sultĂ© pendant la premiĂšre phase 2.215 agents qui n’ont pas Ă©tĂ© recensĂ©s et qu’on n’a pas vus quand on a bloquĂ© les salaires. AprĂšs cela, nous avons eu Ă  croiser le nouveau fichier biomĂ©trique et le fichier de la Caisse nationale de sĂ©curitĂ© sociale. Au dĂ©part, il y avait 1000 agents qui Ă©taient mis en cause, mais avec les justifications, il est restĂ© 476 agents doublement payĂ©s et qu’on a radiĂ©s. Egalement, on a procĂ©dĂ© au dĂ©-doublonnage du nouveau fichier biomĂ©trique. On a constatĂ© 248 agents qui Ă©taient en doublon et qu’on a radiĂ©s. Le contrĂŽle permanent dont j’ai parlĂ© tantĂŽt qu’on a organisĂ© en novembre jusqu’en mars a donnĂ© 2386 agents qu’on est en  train de radier. Au total, le recensement biomĂ©trique a donnĂ© 5. 385 agents fictifs qui recevaient rĂ©guliĂšrement des salaires indus. Si on ajoute Ă  cela le nombre des fonctionnaires qu’on a mis Ă  la retraite en 2014 et en 2015, plus 568 hauts cadres qui Ă©taient en dĂ©tachement soit auprĂšs de l’AssemblĂ©e nationale, soit auprĂšs des Ă©tablissements publics, les grandes sociĂ©tĂ©s en mĂȘme temps ils prennent les salaires dans ces institutions et aussi Ă  la fonction publique. Ils sont aujourd’hui dĂ©gagĂ©s du fichier. 164 autres agents se sont mis en disponibilitĂ©. Volontairement, ils ont quittĂ© la fonction publique pour dire qu’ils vont travailler momentanĂ©ment Ă  leur compte. Quand on totalise tous ceux-ci, on peut avoir prĂšs de 11.000 agents fictifs qu’on a pu dĂ©gager entre 2014 et 2015.

Quel est l’effectif total des cadres de la fonction publique?

Je n’ai pas la derniĂšre situation, mais nous sommes entre 105 et 110 mille cadres parce qu’on a fait un recrutement de prĂšs de 5000 agents Ă  la police en 2014-2015 plus le recrutement auprĂšs de l’enseignement supĂ©rieur.

Qu’est-ce que vous faites  pour assurer la protection sociale de tous ces fonctionnaires?

La protection est un droit du fonctionnaire. C’est confirmĂ© dans le statut gĂ©nĂ©ral des fonctionnaires. Pour la premiĂšre fois depuis plus de 50 ans, le fonctionnaire guinĂ©en n’a pas eu droit Ă  la protection sociale. Avec la volontĂ© manifeste du prĂ©sident de la RĂ©publique en faveur des fonctionnaires, deux institutions ont Ă©tĂ© créées. Entre autres, la Caisse de prĂ©voyance sociale (CNPS) et l’Institut d’assurance maladie obligatoire (INAMO). La CNPS va servir au financement de la retraite qui doit ĂȘtre valorisĂ©. Il ne faut plus que dans les annĂ©es Ă  venir que le fonctionnaire ait peur d’aller Ă  la retraite. C’est parce que la retraite n’était pas financĂ©e. Alors que dans tous les pays du monde, la pension fait l’objet de financement appropriĂ©. Donc, nous nous sommes mis au goĂ»t du jour. DĂ©sormais, l’Etat va cotiser en tant qu’employeur Ă  hauteur de 10% par mois pour un dĂ©part et pour chaque fonctionnaire et 5% que le fonctionnaire doit payer au compte des deux institutions. Cela va permettre de rehausser le niveau de la pension, mais Ă©galement les risques liĂ©s Ă  la vieillesse et Ă  la maladie vont ĂȘtre pris en charge. Donc, une personne retraitĂ©e ne sera plus une personne dĂ©munie, exposĂ©e et abandonnĂ©e.

Est-ce que ces structures sont opérationnelles? 

Ce n’est pas facile. On est en train d’opĂ©rationnaliser. DĂ©jĂ , le conseil d’administration, la direction exĂ©cutive sont mis en place. On a trouvĂ© un local en location  qu’on va bientĂŽt inaugurer.  Le local est en train d’ĂȘtre meublĂ©. Donc, les services vont ĂȘtre installĂ©s et meublĂ©s dans les meilleurs dĂ©lais. MalgrĂ© la conjoncture, l’Etat vient de dĂ©bloquer prĂšs de 5 milliards  de FG la semaine passĂ©e pour pouvoir opĂ©rationnaliser ces deux institutions de protection sociale. GrĂące Ă  l’INAMO, le fonctionnaire guinĂ©en, pour une fois, sera mis Ă  l’écart des soucis surtout liĂ©s Ă  la maladie. Une fois que l’INAMO devient opĂ©rationnel, un fonctionnaire tombe malade, il va Ă  l’hĂŽpital si l’ordonnance coĂ»te 100 FG, l’Etat prend en charge 80% et lui, il paie 20%. Si ce sont les enfants ou l’épouse qui tombe(nt) malade(s), la prise en charge est automatique. Pour n’importe quel problĂšme de santĂ©, de risque liĂ© Ă  la vie du fonctionnaire, l’Etat intervient pour assurer aux fonctionnaires une vie dĂ©cente.

Il y a un autre fait marquant Ă  la Fonction publique. C’est la situation des fonctionnaires recrutĂ©s mais non pris en charge, notamment les douaniers et les enseignants contractuels qui manifestent Ă  chaque fois.

Qu’envisagez-vous pour rĂ©soudre ce problĂšme?

Je ne veux pas m’aventurer. Le gouvernement a donnĂ© son accord en 2015 pour rĂ©gulariser la situation de ces jeunes qui ont des arrĂȘtĂ©s d’engagement, mais ils n’ont pas fait de concours. C’est un droit qu’ils  peuvent revendiquer Ă  juste titre. Suite Ă  ce mouvement de recrutement massif et incontrĂŽlĂ© ayant grossi les effectifs de l’administration. Donc, ces jeunes, Ă  un moment, se sont constituĂ©s en mouvement de revendication.  Le gouvernement a pris en charge le dossier. Et Ă  travers mon dĂ©partement, une commission technique au sein de laquelle ces jeunes sont reprĂ©sentĂ©s, est en train de travailler   sur le dossier. Les agents concernĂ©s ont dĂ©posĂ© leurs arrĂȘtĂ©s d’engagement et leurs diplĂŽmes. Ils suivent de prĂšs tout ce qui se passe pour assurer la transparence total dans le traitement des dossiers. Ils sont au total 5265 personnes Ă  ĂȘtre concernĂ©es. Alors, on va vĂ©rifier l’arrĂȘtĂ© et les diplĂŽmes. S’ils sont authentiques, il n’y a pas de problĂšme. Et s’ils ne le sont pas, on les annule. J’ai dĂ©jĂ  des statistiques provisoires qui varient du jour au jour. Quand la commission fait son travail, nous avons des statistiques qui rendent compte de la situation. Donc, quand ce travail d’assainissement, de contrĂŽle et vĂ©rification va finir les personnes concernĂ©es seront soumises soit Ă  un test de connaissance et vont choisir elles-mĂȘmes entre les dĂ©partements suivants: l’éducation, la santĂ©, l’environnement et la police. C’est dire que le gouvernement a pris en charge ce dossier parce que ce sont des jeunes qu’on ne peut pas laisser pour compte.

L’Etat a signĂ© un protocole d’accord avec le mouvement social concernant l’applicabilitĂ© de la flexibilitĂ© du prix du carburant Ă  la pompe conformĂ©ment au prix du baril au niveau international. Le dĂ©lai Ă©tait fixĂ© dans 90 jours et la date butoir c’est le 19 mai prochain. Est-ce qu’on peut s’attendre Ă  une baisse du prix du carburant?

Vous ne vous intĂ©ressez qu’à cet Ă©lĂ©ment du protocole, alors qu’il comporte 13 points. Il n’y a pas de date butoir. Il ne faut pas inventer. Dans l’accord, les parties sont convenues de maintenir le prix du litre du carburant Ă  son niveau actuel. Par ailleurs, les parties sont convenues si le prix du baril venait Ă  augmenter, le prix Ă  la pompe continuera Ă  ĂȘtre maintenue Ă  8000 FG jusqu’en dĂ©cembre 2016. Toutefois, si le prix du baril se maintient en dessous de 57 dollars US, le gouvernement, le Patronat et le syndicat conviendront du prix Ă  appliquer Ă  la pompe dans les 90 jours.  Cela veut dire que dans les jours Ă  venir nous allons rencontrer nos partenaires sociaux pour nous concerter sur la question et arrĂȘter quelque chose. Parce que le dialogue doit ĂȘtre vivant, dynamique et continu. Avant qu’on ne parte trĂšs prochainement Ă  la confĂ©rence internationale du travail Ă  GenĂšve,  le ministre de l’Enseignement technique et porte-parole du gouvernement et moi-mĂȘme avons pris l’initiative de nous concerter avec nos partenaires sociaux sur la question, pour examiner la chose et voir ce qu’il y a lieu de faire.  Les nĂ©gociations ne sont pas rompues. Elles continuent.

Le prix du baril est en dessous de 57 dollars US. Est-ce qu’on peut espĂ©rer une diminution?

Non, ça vous n’aurez pas ça de ma bouche. Les dĂ©cideurs en  dĂ©cideront.

C’est comme si vous n’ĂȘtes pas libre dans la mise en application de cet accord. Est-ce le cas?  

Non, en ce qui concerne mon secteur je n’ai aucun obstacle. Si je prends la grille salariale, nous travaillons intimement avec les reprĂ©sentants du mouvement syndical pour passer Ă  la transposition de l’ancienne grille Ă  la nouvelle grille. Cet effort de transposition est en cours sur la base du nouveau fichier biomĂ©trique parce qu’on a pris le systĂšme Licence, Master, Doctorat (LMD). Pas plus tard qu’avant-hier dans le cadre de l’application de la grille, nous avons rĂ©uni au niveau du dĂ©partement ici les professionnels de l’éducation, les universitaires, trois universitĂ©s publiques et privĂ©es Ă©taient lĂ  pour rĂ©flĂ©chir ensemble Ă  la catĂ©gorisation des fonctionnaires. Parce que sur la base de cette nouvelle grille dĂ©sormais la hiĂ©rarchie A Ă©clate en trois hiĂ©rarchies: hiĂ©rarchie A1 pour la Licence, A2 pour le Master et A3 pour le Doctorat. La hiĂ©rarchie B aussi Ă©clate en deux c’est-Ă -dire B1 et B2. Seule la hiĂ©rarchie C va rester intacte. Alors, il s’agira de voir maintenant quel va ĂȘtre le positionnement de chacun des fonctionnaires dans l’une de ces hiĂ©rarchies. C’est un exercice qui n’est pas facile. On est en train de recruter un expert en rĂ©forme du systĂšme salarial pour venir nous aider Ă  la meilleure transposition de l’ancienne grille Ă  la nouvelle grille.

Nous voici Ă  la fin de cette interview. Quelles perspectives pour l’annĂ©e 2017?

La premiĂšre perspective c’est d’abord en faveur des fonctionnaires : celle de l’opĂ©rationnalisation de la protection sociale des fonctionnaires. C’est l’une des prioritĂ©s du gouvernement et donc de mon ministĂšre. L’autre prioritĂ© c’est la rationalisation de l’ensemble des ministĂšres. Il s’agira de mettre en adĂ©quation les missions, les structures, les emplois et les effectifs pour rationaliser les effectifs et maitriser la masse salariale. Aujourd’hui, il y a une plĂ©thore dans les cabinets ministĂ©riels. Il y a des fonctionnaires qui viennent juste Ă  la fin du mois pour prendre leurs salaires alors qu’ils ne font rien. Ils sont payĂ©s alors qu’ils ne travaillent pas. Il faut qu’on ait une administration qui contribue au dĂ©veloppement et non qui constitue un frein au dĂ©veloppement.

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Abdoul Malick Diallo

Coréalisée avec le journal Univers jeunes