Le président du Parti du renouveau et du progrès (PRP) a accordé une interview à la rédaction de Guinee7.com, ce mardi 29 juillet 2025. La nomination de Djénab Touré à la tête de la direction générale des élections, la mission de l’Union africaine à Conakry mais aussi la campagne de vulgarisation du projet de nouvelle Constitution étaient au menu.
Guinee7.com : Djénab Touré a été promue à la tête de la direction générale des élections (DGE). Quelle est votre réaction ?
Rafiou Sow : Écoutez, pour nous, c’est une déception. Nous n’avons rien contre Mme Djénab Touré par rapport à sa personne. Tout simplement, l’organe, la DGE, la Direction générale des élections avec laquelle nous ne sommes pas d’accord. Nous avons dit à plusieurs reprises qu’il faudrait créer un cadre de dialogue inclusif où tous les acteurs sociopolitiques se retrouveront, discuteront ensemble de la conduite de la transition comme l’avait promis le président de la transition le 6 septembre 2021. Et comme le stipule aussi la charte de la transition. Donc nous, aujourd’hui, nous réclamons la mise en place de ce cadre de dialogue, mais aussi la mise en place d’un organe de gestion indépendant à l’exemple de la CENI (commission électorale nationale indépendante). C’est ce que nous voulons pour assurer une certaine transparence par rapport à ces futures élections. Sinon, nous n’avons rien contre elle, nous n’avons pas de problème avec elle, simplement, nous ne sommes pas d’accord avec l’organe qui est là, qui est affilié, disons, au MATD (ministère de l’Administration du territoire et de la Décentralisation), qui est sous les ordres des autorités actuelles, et surtout que toute l’administration guinéenne est en train de faire campagne pour la candidature du général Mamadi Doumbouya. Donc, c’est ce que nous dénonçons. Nous appelons, nous continuons encore à appeler le général Mamadi Doumbouya à la mise en place de ce cadre de dialogue tant souhaité.
Djénab Touré a servi dans l’ancienne CENI, est-ce qu’elle vous inspire confiance dans l’organisation des élections ?
Écoutez, aucun cadre de l’administration guinéenne aujourd’hui ne m’inspire confiance en ce qui concerne les élections. Surtout, quand il s’agit d’organiser des élections libres et transparentes, nous savons très bien, ça fait plusieurs années, depuis l’avènement du général Mamadi Doumbouya, toute l’administration guinéenne, ça sert à faire la promotion de sa candidature. Donc, comment vous voulez qu’on ait confiance à un cadre de l’administration guinéenne ? Non, nous n’avons pas confiance, nous voulons discuter autour d’un cadre de dialogue, ensemble décider de l’organisation des futures élections et de la conduite de la transition. Voilà ce que nous réclamons et nous l’exigeons, nous le souhaitons humblement et nous espérons que le présent de la transition reviendra sur tout ça et essaiera d’aller dans le sens du respect de ces engagements pris.
En parlant de dialogue, le Premier ministre a récemment tendu la main à la classe politique pour la réouverture du dialogue. Comptez-vous saisir cette main tendue ?
Non, pas du tout, vous n’avez pas compris, le Premier ministre ne nous a pas tendu la main en matière de cadre de dialogue, le Premier ministre ne faisait qu’allusion au cadre de dialogue existant. Nous, nous ne faisons pas partie de ce cadre de dialogue, c’est un cadre de dialogue que nous récusons, ce cadre de dialogue est sélectif, il exclut la majeure partie des acteurs politiques et sociaux, donc ce que nous voulons, c’est pour ça que nous insistons sur un cadre de dialogue inclusif.
Moi j’ai eu des discussions avec le Premier ministre, il me disait qu’il allait aller dans ce sens, j’espère, et d’ailleurs j’avais souhaité qu’il soit notre porte-parole vers le journal Mamadi Doumbouya pour la mise en place d’un cadre de dialogue accepté. Sinon, la dernière fois le Premier ministre faisait allusion au cadre de dialogue existant et nous, nous ne faisons pas partie de ce cadre de dialogue.
Une mission de l’Union africaine séjourne actuellement à Conakry. L’objectif est de s’enquérir de l’état d’avancement des préparatifs pour le retour à l’ordre constitutionnel. Votre lecture ?
Aujourd’hui, nous, nous avons, ça fait plusieurs années, nous n’avons plus confiance à ces structures, l’Union africaine ou la CEDEAO, nous nous sentons abandonnés par l’Union africaine, la CEDEAO, même les Nations unies, les Guinéens, ils sont totalement abandonnés dans ce sens, puisqu’aujourd’hui, on est en phase de la confiscation du pouvoir et l’Union africaine ne fournit aucun effort. Nous avons réclamé un cadre de dialogue, d’ailleurs l’Union africaine l’avait réclamé, aussi à travers la CEDEAO. Ce cadre de dialogue n’est pas là, mais l’Union africaine continue à collaborer avec ses autorités et attend l’exclusion d’autres acteurs.
L’Union africaine est venue en Guinée rencontrer les autorités guinéennes, mais elle ne nous a pas rencontrés. D’habitude, quand ils viennent, à leur attitude, ils nous invitent, soit ils passent dans nos QG pour échanger avec nous, soit ils nous invitent dans leur QG pour échanger avec eux, mais nous ne comprenons pas que l’Union africaine vienne ici, que ce soit le MATD qui nous invite à rencontrer les cadres de l’Union. Ça veut dire que même les communications à ce niveau sont filtrées, nous ne pouvons nous parler franchement, et ils ne peuvent nous parler franchement si c’est sous la supervision du MATD. Dans ce cas, nous ne comprenons pas la mission de l’Union africaine ici. Nous ne comprenons pas du tout. Nous allons essayer de rentrer en contact avec eux pour échanger, discuter pour que les choses reviennent à la normale.
Aujourd’hui, sans cadre de dialogue, je pense que c’est interdit. Ça ne fait pas de bonnes choses. Donc nous continuons encore à insister et à réinsister sur un cadre de dialogue où tous les acteurs politiques seront autour de la table, mais nos partenaires techniques et financiers aussi seront là pour qu’ensemble nous décidions de conduire la transition. Si ce n’est pas cela, je pense que l’Union africaine n’est pas sur le bon chemin.
Les membres du gouvernement sont déployés sur le terrain dans le cadre de la vulgarisation de la nouvelle Constitution. Peut-on dire que c’est une campagne avant l’heure ?
Écoutez, ce n’est pas du tout une vulgarisation. Ils sont en train de faire campagne pour le oui à une constitution dont les Guinéens n’ont même pas pris connaissance. Ce n’est pas une vulgarisation. Je pense que ces gens-là ne savent pas ce qu’est une vulgarisation.
Je salue d’ailleurs le Premier ministre qui a tout dernièrement essayé de les remettre, de les cadrer en leur disant que ce n’est pas une campagne pour un oui, mais plutôt c’est une vulgarisation. S’il faut mettre la constitution à la disposition des citoyens, il faut les exécuter, c’est écrit tout simplement. Pas de commentaire, mais uniquement c’est écrit pour qu’ils apprécient eux-mêmes. Mais malheureusement, c’est une campagne qui a commencé avant l’heure. Et nous dénonçons cela aussi. Nous disons que tout ça, ça risque de nous conduire vers le chaos.
Quelles sont vos recommandations aux citoyens face à cet état de fait ?
Je dirais aux citoyens guinéens et à nos militaires et à nos sympathisants de rester mobilisés, d’exiger que les choses soient transparentes, que le général reste sur ses engagements, qu’il y est ce cadre de dialogue pour discuter ensemble de la conduite de la transition. Et je leur demanderais de rester dans ce sens, d’exiger cela et de ne pas négocier leur avenir politique, leur avenir, disons, simplement pour aujourd’hui. En résumé, je dirais aux citoyens de rester mobilisés, d’exiger que les choses soient respectées, qui est son cadre de dialogue, et que les engagements pris par le CNRD soient respectés.
Entretien réalisé par Bhoye Barry pour guinee7.com