Censure

Traumatisme à la CAN 2019/ Si Bantama et Antonio ne sont pas responsables, qui est comptable ?

En plein scandale lié à la gestion de la participation guinéenne à la 32è édition de la Coupe d’Afrique des nations, la Fédération guinéenne de football n’a rien trouvé de mieux que de monter au créneau et faire bloc pour défendre l’indéfendable. Et avec des arguments plutôt tirés par les cheveux…

Les Guinéens étaient déjà frustrés par la piètre participation du Syli national de Guinée à la CAN. Ils ont même dû boire le calice jusqu’à la lie avec la sortie incroyable du président de la Féguifoot, Mamadou Antonio Souaré, qui a trouvé un coupable tout désigné après l’élimination de l’équipe guinéenne (3-0 face à l’Algérie en huitièmes de finale) : le sélectionneur national Paul Put. Accusé d’avoir fermé les yeux sur des pratiques de racket au sein du Syli, avec des joueurs et des membres du staff technique sur lesquels il n’avait aucune emprise, Put a vu, pour ainsi dire, ses cafards exposés sur la place publique mais, après avoir encaissé les coups pendant 3 jours, il a traité les propos de Souaré de « mensonges honteux ». Naturellement, ces révélations ont provoqué à la fois colère et suspicion, avec, hormis celui de Put, deux noms qui revenaient sur la sellette dans cette aventure ratée : Antonio Souaré et Sanoussy Bantama Sow. Pour éteindre l’incendie, le Général Mathurin Bangoura, numéro 2 de la Féguifoot, a sonné la mobilisation pour… défendre Antonio et Bantama. Cité par notre confrère Guinéetopsports. Voilà ce qu’il dit : « On parle d’Antonio Souaré pour dire que c’est lui qui est à la base de l’échec, on parle de Bantama Sow, c’est lui qui est à la base de l’échec (…). Parmi toutes les équipes présentes à cette CAN, nous sommes le seul pays en Afrique, qui n’a aucun centre de foot. Mais comment voulez-vous que nos équipes se qualifient ? Comment voulez-vous, qu’on ait des grands joueurs ? Sur 27 joueurs guinéens, vous ne trouverez pas 4 joueurs qui jouent dans un championnat de première division en Europe (…). Aujourd’hui, la tête de Antonio Souaré et celle de Bantama sont mise à prix. Chose qui ne devrait pas être ».

Plus loin, il poursuit, toujours cité par notre confrère : « Ce qui est en train d’être fait aujourd’hui, c’est le gouvernement guinéen qui est à la base de tout ce qui se passe. Nous n’avons aucun centre (…). Et lui qui est en train d’être insulté, maltraité partout, il est le premier d’abord à penser à mettre un centre en place. Le deuxième, c’est KPC. Ailleurs, quand des gens décident de le faire, ils sont appuyés par le gouvernement. On ne peut pas ne pas aller de l’avant. Le Mali a fait plus de trois ans sans organiser de championnat, le Ghana la même chose. Mais toutes les compétitions africaines et mondiales, vous trouverez toutes les équipes maliennes. C’est parce que les centres sont là ». Soit ! Et puis quoi encore ? Si le ministre des Sports, membre du gouvernement, et le président de la Féguifoot ne sont pas responsables de ce traumatisme national, provoqué par la CAN 2019, qui est responsable ?

En vérité, les Guinéens ont des raisons d’être en colère parce que le Syli est frappé par plusieurs scandales :

  • Le ministre Sow est le premier responsable du Sport au sens large, des conditions de sa pratique (donc des projets d’infrastructures qui y sont liés), de la formation de tous les acteurs et par conséquent des résultats qui en découlent. Vouloir soustraire sa responsabilité de ce qui s’est passé à la CAN 2019 est un scandale.
  • Le président de la Féguifoot est le premier responsable de la gestion du football en Guinée. Sa gestion impacte directement les performances des clubs et sélections nationales guinéennes. Aucun raisonnement ne permet de le préserver des critiques liées à sa fonction. Les propos visant à l’isoler du fiasco de la CAN 2019 sont ni plus ni moins une façon de noyer le poisson.
Cette révélation de Ibou Traoré, capitaine du Syli national
  • Les conditions de recrutement de Paul Put sont un autre scandale. En dépit de la réputation de Put, de sa condamnation à 2 ans de prison avec sursis, les autres candidatures ont été toutes recalées sans qu’on ne comprenne pourquoi. Dès lors, il n’est guère étonnant de constater que les choses finissent en eau de boudin.
  • Les conditions qui ont prévalu à la sélection des 23 joueurs guinéens sont encore un scandale. Des joueurs qui ont participé activement à la qualification du Syli à la phase finale de la CAN 2019 comme Seydouba Soumah « Konkolé », Sadio Diallo, Ibrahima Sory Conté « Maïbra » ont été écartés de la sélection sur des bases subjectives, au profit des binationaux qu’un certain Amadou Diaby a fourgué au groupe. Si Simon Falette a été une bonne pioche, force est de reconnaître que Julian Janvier ou Mikael Dyrestam sont des bides. Que dire de tous ces joueurs performants qui n’ont pas eu la chance d’être dans le groupe alors qu’ils en avaient la qualité : Ibrahima Sory Sankhon, Amadou Paye Camara, Alseny Camara, etc. ?
  • La gestion du groupe de la CAN est un scandale et sur ce point c’est Antonio Souaré lui-même qui est monté au créneau. On ne peut pas fermer les yeux sur les graves accusations de racket formulées à l’endroit d’un mystérieux « parrain » belge des 17 membres du staff technique qui ont accompagné Paul Put dans son aventure en Guinée.
  • Le démenti cinglant diffusé dans la presse par Paul Put contre les propos du président de la Féguifoot qu’il traitre de « menteur » est un scandale. Les Guinéens ont besoin de savoir qui a menti dans cette affaire et pourquoi le sélectionneur national défie le président de la Féguifoot, censé être son employeur.
  • La gestion des fonds, mis à la disposition du ministère des Sports mais également du fonds mobilisé dans le cadre de la CAN 2019, doit faire l’objet d’un audit. Ne pas le faire serait un scandale.

Avec tous ces points soulevés, qui peut encore affirmer que les Guinéens n’ont pas le droit de demander des comptes à leurs responsables chargés du Sport et du football ? Arrêtons ce jeu là et regardons les choses en face !

Ibrahima S. Traoré pour guinee7.com

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