Censure

Perte d’emplois, renégociation de contrats, crise de confiance…Le secteur minier guinéen en zone de turbulence

Le secteur minier guinéen traverse actuellement une période délicate, surtout après l’arrêt des chantiers du Simandou et le ralentissement du projet Nimba. En dépit des déclarations optimistes du ministre des mines, Moussa Magassouba, des experts miniers laissent transparaître leurs craintes…

80% du personnel local envoyés en chômage technique par HPX

High Power Exploration (HPX), l’entreprise qui contrôle la principale réserve de fer du Mont Nimba, via la Société des Mines de Fer de Guinée (SMFG), a envoyé ces derniers jours environ 80% de son personnel local en chômage technique.

Selon la presse locale, les nouvelles autorités militaires qui ont pris le pouvoir par un putsch en septembre 2021, ne seraient pas totalement convaincues par l’idée de l’évacuation du minerai de fer par le Liberia, en dépit d’une convention de base signée par la précédente administration, sous l’ex président Alpha Condé.

L’exploitation du Mont Nimba se heurte en effet à deux contraintes majeures : la question de l’évacuation de la production – Ndlr : le Liberia qui dispose du port de Buchanan est plus proche de la côte guinéenne située à plus de 1000 km – et les questions environnementales, la zone du Nimba étant protégée par l’Unesco.

« HPX est une compagnie appartenant au milliardaire américano-canadien, Robert Friedland, et cela offre une marge de manœuvre dont ne pourrait sans doute pas bénéficier une entreprise non occidentale, à cause des normes environnementales jugées plus élevées chez les compagnies australiennes, américaines ou européennes », fait remarquer à WESTAF MINING un expert minier.

Avant cette évolution du projet Nimba, AGB2A, une autre entreprise a connu des difficultés, du fait d’un mauvais règlement d’un conflit opposant les actionnaires guinéens de la société à leurs partenaires chinois.

En effet, la solution encouragée par le ministre Magassouba, a permis aux actionnaires chinois, qui étaient minoritaires (42%), de prendre le contrôle de la direction générale de la société, face au groupe de Guinéens (Ndlr : Guinea International Corporation ou GIC, qui détenait 58% des actions)…

AGB2A bat de l’aile, plus de 700 emplois en jeu…

Cette configuration inédite a suscité des interrogations jusqu’à une date récente, occasionnant des problèmes non seulement avec un des propriétaires des permis amodiés à AGB2A, mais également de coordination entre les deux groupes d’actionnaires, alors que ce point est indispensable à la poursuite normale des activités de la société. AGB2A avait pourtant exporté plus d’un million de tonnes de bauxite en une année, avant que ne surviennent ces blocages. Plus de 700 emplois sont en jeu…

L’arrêt forcé du méga projet Simandou, un gros couac

L’autre gros couac est relatif à l’arrêt forcé du méga projet Simandou, le plus gros projet minier actuellement implanté en Afrique de l’Ouest (pour un coût d’au moins 15 milliards de dollars USD).

« La décision d’arrêter les travaux a été catastrophique. Elle a permis de freiner l’élan de Winning Consortium Simandou (WCS), alors que la compagnie était parfaitement lancée pour réaliser tous les travaux d’infrastructures nécessaires à l’évacuation du minerai de fer du Simandou (voir vidéo ci-dessous)», fait remarquer un autre expert minier.

Aux dernières nouvelles, WCS avait mis au chômage technique quelques 15000 employés dont 11700 Guinéens.

« Le schéma de co-entreprise, avec l’autre partenaire (Rio Tinto) proposé est en réalité une perte de temps. Les 15% d’actions de l’Etat annoncés à grandes pompes ne règlent pas du tout le problème de la réalisation du projet. Les choses deviennent d’ailleurs plus compliquées parce que les partenaires privés devront renégocier avec tous ceux qui s’étaient engagés financièrement dans le projet pour faire passer la pilule de la co-entreprise et des actions gratuites offertes à l’Etat guinéen, si jamais elle passe », souligne-t-il.

Selon lui, bloquer un projet aussi visible à l’international et aussi stratégique a été le plus inquiétant signal envoyé en direction des investisseurs étrangers, « les seuls pour l’heure capables de développer le Simandou ».

La confiance mise à rude épreuve dans le secteur minier

D’après ces deux experts interrogés par WESTAF MINING, il faudra beaucoup de temps pour ramener une base de confiance suffisante pour relancer la machine, principalement dans le secteur du fer.

En attendant, le secteur de la bauxite devra trouver son équilibre, avec le « prix de référence » imposé par les nouvelles autorités qui exigent, par ailleurs, la construction de raffineries d’alumine…

Source : Westaf Mining

Titre et intertitres : guinee7

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