Censure

La société civile s’est fait museler par la classe politique qui trompe la vigilance du Peuple (Par Ben Daouda Touré)

C’est l’une des rares fois que  l’opposition politique et le pouvoir sortent d’un dialogue aussi important, sans qu’ils ne se tirent par les collets, sans qu’il n’y ait de pneus brulés, voir mort d’hommes.  Connaissant la Guinée, je me suis dis « quelque chose se trame sur le dos du Peuple ». A lire les réactions des intellectuels, des juristes et de plusieurs analystes politiques mes soupçons sont justifiés. Pour un accord  signé au nom de la Démocratie et de la bonne gouvernance,  Il n’y a que les vieux partis politiques qui ont le sourire aux lèvres.

Tout le monde dénonce ces accords et parlent de violation de Constitution. C’est le commencement de notre problème. De quelle Constitution parlent-ils ?

L’arrangement politique décidé à huis-clos avec la bienveillance de la Société Civile qui a permis aux politiciens d’aller aux élections, pour les beaux yeux de Bernard Kouchner et Associés, qui n’avaient d’autres obsessions que de se débarrasser du CNDD après la fameuse  « La Guinée n’est pas une province de la France » de Dadis ou, celle voulue et acceptée par le Peuple lors du referendum populaire de Lansana Conté ?

De quelle Constitution  parlez-vous ?

Si nous prenons conscience que ce qu’ils appellent aujourd’hui  « CONSTITUTION », n’est rien d’autre qu’un arrangement  entre partis politiques, alors nous comprendrons pourquoi les textes législatifs ou juridiques  n’ont aucune valeur.  On constate que les hommes politiques parlent toujours du respect des différents accords qu’ils se passent entre eux et non du respect des TEXTES FONDAMENTAUX de la République : Tout est arrangement dans un cercle vicieux au sein duquel la Société Civile occupe une place de choix. Elle s’est fait museler par la classe politique  qui trompe la vigilance du Peuple, pour bénéficier de sa charité clientéliste. Voilà pourquoi il n’y a personne pour dénoncer les contradictions entre ce qu’ils appellent « Constitution » et les Loi électorales. La Société Civile a failli à sa mission de chien de garde de la Démocratie et des Droits de l’Homme. Les citoyens devraient être rassurés lors des négociations par la présence de la Société Civile à la table des discussions. Mais hélas, que  le constat est amer !

Prisonnière  du gain facile, la Société Civile est obligée de pactiser avec le Pouvoir ici et les partis politiques là, chaque responsable  rêvant  d’être à la tête de la  CENI ou d’un poste ministériel. On ne peut pas être élu à la présidence d’une Institution sans la complicité des partis politiques ou du Pouvoir. Et hypocritement,  chaque responsable de ce conglomérat est affilié à un parti politique. C’est une autre facette malheureuse de notre problème. Au lieu d’exiger le respect des Textes, la Société Civile se bat pour remplacer la CENI ! Il n’y a pas d’Institution Républicaine où elle n’est pas présente ou pour laquelle elle ne se bat pour être membre ….Tous partisans politiques, ils ont quand même le toupet d’apposer leurs signatures sur des papiers au nom des citoyens, sans aucun respect pour leurs opinions.

Les partis politiques font ce qu’ils veulent parce qu’il n’y a pas de « Mouvements Citoyens » conséquents en Guinée.  Dans les pays où la Société Civile se prononce sans équivoque sur la gouvernance, les populations prennent conscience et la  chose  politique bouge ; le Burkina Faso, le Sénégal, la Tunisie en sont des témoignages parmi d’autres.

Si l’émergence d’une Société Civile est nécessaire à l’exercice de la Démocratie, alors il est temps qu’on réfléchisse profondément à  la qualification de ce «  métier » en Guinée. Sinon il tend à devenir un danger public pour notre Nation.

C’est parce  les organisations de la Société Civile ne donnent aucune valeur à leur raison d’être, que les partis politiques bafouent nos Textes et, incontrôlés vont dans tous les sens, sans que nos populations ne comprennent ce qui se trame sur leur dos. Pas d’information, pas de communication, tout est opaque à leur niveau.

On apprend tout de façon désordonnée, informelle, par rumeurs ou par voie presse (peu informée elle-même) et le plus souvent des pays extérieurs, sur des sujets que devraient s’approprier les Organisations de la Société Civile.  Normalement elles devraient prendre  le Leadership de la lutte qui se mène sur l’internet actuellement (pour ou contre les Accords) pour  une information citoyenne, être présente sur le plateau des débats, pour nous éclairer sur les questions de la Gouvernance : La Démocratie à la base,  les élections locales, surtout quand on sait que les élections sont synonymes de violences dans notre pays.

Parce qu’il n’y a pas de Leadership des Mouvements Citoyens que nous sommes dans un débat désordonné, déjà gagné par des partis politiques qui n’ont jamais pu organiser une élection saine quand ils étaient aux affaires, à tort ou à raison.

Le citoyen électeur, membre des 75‰ de ceux qui ne savent ni lire ni écrire, ne sait pas ce qui se passe sur l’internet  ni dans les journaux, seules places des débats en cours.

A quoi sert la Société Civile guinéenne ?

Pour revenir aux accords, il y a tellement d’analyses sur la toile que je ne crois pas pouvoir contribuer pour grand-chose. De toutes les analyses, voici celle qui résume l’essentiel de mes idées :

« Aujourd’hui, l’heure n’est à pas d’épiloguer, encore moins à polémiquer. L’essentiel du débat ne sera pas non plus de faire constater ou non l’inconstitutionnalité de la désignation des présidents de Conseils de quartier/district. Mais plutôt, à affirmer notre sens des responsabilités, faire montre de profondeur d’analyse, témoigner de la maturité politique et philosophique à (re)produire un modèle de représentation locale basé sur le principe de l’élection et inspiré de nos réalités pour une bonne administration. Ce n’est qu’en consacrant le principe de l’élection à la base, que l’on pourrait espérer donner tout son sens à la démocratie pour une gestion horizontale, c’est à dire de la base au sommet. L’heure est grave! Car, il s’agit clairement de la confiscation de l’élection à la base, donc de la violation des droits des Citoyen-ne-s »  PENDESSA Camara

Depuis l’avènement de la 3ème République, Il y a eu toujours des crises majeures allant jusqu’à la perte de vie humaine, partout où les partis politiques ou le pouvoir, se sont permis de designer les représentants des communes, quartiers, districts ou de leurs propres partis politiques, contre l’avis des populations locales: Tanènè, Pita, Siguiri, Kankan, N’zérékoré, Madiana, Guékédou, entre tant d’autres en sont de tristes illustrations.

En dehors des Textes de Loi, ça c’est la réalité inconstable du terrain. C’est cette déstabilisation de nos communautés que les partis politiques veulent pérenniser au mépris de la PAIX SOCIALE à travers l’Assemblée Nationale ? C’est une honte !

« Ceci dit, et sans se laisser distraire par une quelconque querelle de vocabulaire, il importe tout de même de porter à l’attention du Parlement, que la légalité ne fait pas forcément la légitimité » Pendessa Camara

Qui est là pour expliquer cette maxime aux populations ? Pas Notre Société Civile !

La Société Civile est le baromètre du progrès social et de la Démocratie.

Facile donc mesurer celui de la Guinée en la matière. 

Ben Daouda Toure

Aframglobal@aol.com

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